Bruit Noir, si noir


Le bruit blanc, ce son qui comporte toutes les fréquences du spectre émises aléatoirement avec la même énergie est une anomalie pour l'oreille. Il est aussi susceptible de soulager ceux que les acouphènes, ces bruits imaginaires, rendent fous.

Le Bruit Noir, tel que conçu par Pascal Bouaziz et son batteur Jean-Michel Pirès (starter sinon moteur de ce projet) semble lui voué à nous soulager de la cacophonie, bien réelle, du monde. Sur un vacarme minimaliste et déboîté (batterie autiste, cuivres ivres), Bouaziz vient poser, détaché, un murmure de constats amers non dénués d'un humour plus que jamais politesse d'un désespoir abyssal (La Province).

À la sortie de Mendelson (2013), terrifiant et prodigieux triple album de... Mendelson, si noir déjà, on se demandait et on lui demandait comment il pourrait aller plus avant dans la radicalité, labourer plus en profondeur ces no man's land qui sont comme une banlieue de la vie, fouiller plus profond, à mains nues et mots crus, les entrailles d'une aliénation disséquée depuis cinq albums (dont deux sont prochainement réédités par le label Ici d'ailleurs).

Bruit noir I/III est la réponse cinglante à cette question, celle d'un type dont les gencives disparaissent (sur Joy Division) et qui s'écrit un Requiem, regardant ultimement la vie en face comme une préface de la mort, ravivant les souvenirs comme on invoque les fantômes. Un requiem, on l'apprend en dernier ressort, qui est aussi un Adieu à l'enfance – l'un de ses thèmes de prédilection. Adieu à l'innocence donc, qui est peut-être la vraie mort.

Bruit Noir
Au Sonic mercredi 24 février


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