Sigur Rós : Route One direction

En sortie de projets parallèles joueurs et en cours de tournée, en attendant l'album le trio islandais Sigur Rós fait une halte par le Théâtre antique. Comme dirait son chanteur : « Tjú tjúúúúúúú !!! ».


Glorieuse incertitude du spore musical. Le désormais trio à cordes et à cris (d'angelots), à tambours et trompettes (parfois) Sigur Rós se lance dans un projet méga-concept (même si d'une simplicité évangélique) ? Soyons francs, Radiohead nous faisant le même coup on s'étranglait avec nos propres bâillements. Là non, ça prend, ça essaime, ça fascine. Glorieuse incertitude de la subjectivité aussi, donc.

Mais il faut revenir sur cette idée de simplicité dans la sophistication. Quand Sigur Rós taille la route pour une tournée locale triomphale à domicile en 2006, il ne s'embarrasse pas de Zénith, de stades ou de fan-zones. Et pas parce que pour trouver un Zénith dans la péninsule d'Ísafjörður, tu peux toujours te lever avec le soleil d'été, qui lui ne se couche pas, t'es pas rendu. Parce qu'ils sont comme ça, c'est tout : ils investissent un champ, un cirque de pierre, un bord de route, les gens viennent en masse, s'assoient dans l'herbe, le groupe filme le tout et les coulisses (Jonsi, le chanteur boit une tisane, un vieux jouet traîne, ce genre) et c'est à pleurer — Heima, disponible dans le commerce.

Là donc, pour en revenir au sujet, les voilà empruntant non pas la mythique Route 66 mais la Route One, qui est d'ailleurs un peu à l'Islande ce que la route 66 est aux États-Unis puisqu'elle permet de relier deux places fortes du pays Reykjavik... et Reykjavik, en faisant le tour de l'île.

Trois ans après

L'idée étant de filmer ce trajet en caméra fixe — paysages sublimes ou déprimants, ça change vite — pour un trip en streaming et en direct de 24h sur Youtube (c'était le 20 juin dernier et visionnable). Et d'y accoler une geste musicale bouclée sur l'idée d'hypnose : utilisant leur dernier single Óveður qui vient tout juste d'apparaître sur les Internets et qui ne dure pas, évidemment, 24h, le groupe a laissé à un logiciel le soin d'en créer de manière aléatoire les variations.

Voilà tout Sigur Rós : cette capacité à faire se télescoper le perché et le tellurique, la nature et la technologie, la création et l'aléatoire. l'abstrait et le concret. À preuve, deux des membres du groupe sortent à peine d'un travail de sublimation des travaux titanesques de la Tate Modern Gallery au travers de quatre films musicaux. Autant de signes d'un groupe qui a des fourmis dans les doigts et qui, même réduit à sa plus simple expression (ils seront trois sur scène) au Théâtre antique, trois ans après, devrait sans doute dérouler outre Óveður, déjà livré en live, quelques morceaux de son prochain album travaillé avec John Cogleton (Bill Callahan, Black Angels, Angel Olsen, Explosions in the Sky). Et nous faire prendre la Route One pour les étoiles sans passer par le contournement ouest.

Sigur Rós
Au Théâtre antique de Fourvière le mercredi 6 juillet (complet)


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