Un Sérail peu enlevé

Mozart en été, ça semblait bon. L'Enlèvement au Sérail, longtemps resté dans l'ombre de La Flûte enchantée et de Don Giovanni, est à l'affiche de l'Opéra de Lyon dans une mise en scène de Wajdi Mouawad.


L'Enlèvement, c'est une bouffée d'air pur, l'emblème du renouveau d'un genre, le point de bascule dans la carrière de Mozart. L'ouvrage mêle à la perfection opéra buffa et opéra seria. Sur fond de divertissement, nous sommes au cœur des grandes préoccupations contemporaines : la peur de l'autre, le droit des femmes, l'acceptation des religions…

Depuis que Serge Dorny a pris les commandes de l'Opéra de Lyon, il a très intelligemment imposé que des metteurs en scène venus d'autres horizons se collent à l'univers lyrique : on se souvient du merveilleux Dialogue des Carmélites mis en scène par Christophe Honoré. Pour cet enlèvement, Wajdi Mouawad fait ses débuts à l'opéra et sa réussite n'est pas totale.

L'auteur et comédien libano-québéquois s'est pris de passion pour l'œuvre de façon quasi organique et nous assène des arguments pédagogiques sur l'acceptation des différences qui ont profondément ennuyé les spectateurs. Le décor appuie à l'excès sur le propos du metteur en scène : de lourdes portes s'ouvrent et se referment, une sphère omniprésente symbolise certainement un monde oppressant et inconnu.

La mise en espace est ultra statique, jusqu'à ce chœur final tant attendu,  Longue vie au Pacha Selim,  d'habitude si joyeux, si festif. On attendait que le miracle jaillisse de la fosse tant on connait la fougue de Stefano Montanari, mais le miracle n'a pas eu lieu : il nous a fallu tendre l'oreille plusieurs fois et le reste du temps attendre quelques envolées bienvenues. Un très beau quatuor vocal, dans le pur esprit mozartien, a sauvé cette production, chacun capable de piano des plus nuancés comme de puissance la plus éclatante. Un vrai coup de chapeau à David Steffens qui campe un Osmin drôle et vocalement très convaincant.

L'enlèvement au Sérail
À l'Opéra de Lyon jusqu'au 15 juillet


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