Vaudou Game, funk transatlantique

Adeptes d'un funk rêche et ultra addictif, auteurs de tubes instantanés comme Pas Contente ou le récent La Vie c'est Bon, capables de longues transes à la Fela ou Poly-Rythmo, les Lyonnais de Vaudou Game, emmenés par le charismatique Peter Solo, reviennent muni d'un second opus en forme de classique : Kidayù.


On définit souvent Vaudou Game comme un groupe d'afro funk ou de funk vaudou, explorant un univers proche du TP Orchestre Poly-Rythmo de Cotonou : es-tu d'accord avec ces références et les revendiques-tu ?
Peter Solo : Je suis à fond dans la filiation avec Poly-Rythmo et avec Roger Damawuzan. C'est une fierté : je préfère que l'on me compare à mes aînés plutôt qu'à Michael Jackson, par exemple ; si on me disait que je m'inscrivais dans sa filiation à lui, je comprendrais moins...

Certains morceaux des deux albums s'approchent plus du blues, développent une certaine spiritualité, s'éloignent de l'aspect dansant : je pense à Ata Calling par exemple...
Dans la musique, il n'y a pas que la danse. Il y a des moments de recueillement, de ressource, d'émotions fortes. Ces instants d'intimité donnent du relief à un discours, on se doit d'avoir des ambiances différentes à proposer pour varier les énergies et les émotions. Mais cette gamme de morceaux, lents et plus intérieurs, est aussi une gamme authentiquement vaudou togolaise, reprise des chants traditionnels et sacrés.

Le vaudou, c'est le respect de la nature, du monde visible ou invisible qui nous entoure. Peut-on parler de philosophie de vie ? Comment le faire passer sur scène ?
Oui, c'est une philosophie de vie ! Sur scène, la musique est un langage et une énergie qui fait passer ce message. Même si je le chante dans ma langue, une partie de la personne en face comprend le discours intuitivement et l'interprète grâce à l'énergie communicative du vaudou, qui est très positive. Elle nourrit l'âme et la conscience, autant que le cerveau. Et mon discours en français touche les gens.

Kidayù, votre second album, sort ces jours-ci sur Hot Casa. Quelle en a été la génèse ?
Les thèmes abordés dans les paroles sont cette fois plus directs, les textes fonctionnent moins par allusion. La Nature qui décide, Révolution... On a posé plus de paroles en français : je veux chanter dans la langue que j'utilise au quotidien dans ma vie à Lyon, pour parler à tous les Français et les Africains.
La musique se veut fraîche et veut relever le défi de jouer et d'écrire le funk avec cette langue française.

Pourquoi passer du format solo sous ton nom, sous lequel tu avais sorti deux albums, au format groupe avec Vaudou Game ? Qui sont les musiciens qui t'accompagnent dans ce projet ?
J'ai toujours travaillé avec un groupe, même si le projet s'appelait Peter Solo. Sur mes deux premiers albums, il y avait un groupe. Les musiciens qui m'accompagnent maintenant m'ont rejoint lors de la genèse de Vaudou Game, il y  deux ans, et pour certains un peu plus tard. J'écris et je compose les morceaux qui parlent de ma culture, que connaît moins mon groupe, j'amène l'essentiel et eux apportent leurs influences musicales et des propositions d'arrangements. J'ai fait l'école de la brousse, spontanée, ils ont fait le conservatoire : on fait le mélange.

Quelques mots sur Roger Damawuzan, votre oncle, pionner de ce funk dans les 70's, qui vous rejoint parfois sur scène ?
C'est le mentor de Vaudou Game. J'ai enregistré mon premier album au Togo dans son studio il y a vingt ans, j'ai beaucoup travaillé avec lui à Lomé. Le groupe est très heureux de jouer avec lui en Europe, c'est une bête de scène, le James Brown togolais.

Black Atlantic Club, c'est plus qu'un nom de soirée puisqu'il fait appel à Paul Gilroy : quels sont vos liens et vos engagements avec l'Amérique Noire, avec les Caraïbes, avec la diaspora africaine ? 
Le lien est culturel déjà, la musique fait des aller/retour entre l'Afrique et l'Amérique. Le funk, le rythm'n'blues sont les fruits des ces trajets. Au Togo, on a aussi  des Afro-Américains, des Cubains, des Sud-Américains qui viennent dans mon village faire des cérémonies vaudou, reconnecter avec une source de leurs pratiques dans leurs pays. Le vaudou est un lien avec mes cousins d'Amérique et d'Haïti.

Black Atlantic Club
Vaudou Game + James Stewart + Raoul K
Au Sucre le samedi 17 septembre


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