La mécanique bien huilée du cirque Eloize

Quatre ans après sa création, Cirkopolis du cirque Eloize débarque à Lyon avec force acrobaties et le sens du grandiose. Triomphe garanti grâce à des artistes-athlètes rodés et sacrément soudés.


De toute évidence, avant même la qualité individuelle de chacun, le collectif est leur force. Les dix membres du casting de Cirkopolis font alliance pour ce spectacle qui, plus que Nebbia, est narratif. Au cœur d'un monde futuriste passé (une sorte de Métropolis), des jeunes gens, tous semblables en costard gris, s'agitent, traversent de long en large le plateau. Ils sont affairés. Comme si le monde industriel, représenté par des images de machines des temps modernes, allait céder le pas à celui de la finance. Wall Street balbutie.

Un travail vidéo prolonge cette brume des villes qu'une circassienne de la roue Cyr défie, robe rouge voluptueuse collée à la peau. Ses homologues masculins de la (double) roue allemande se mettront jusqu'à cinq pour pousser leur engin. C'est la force du cirque Eloize : à défaut d'émouvoir, ils maîtrisent mieux que personne leurs agrès et en font une utilisation plus technique que les autres, comme ce mât chinois en fin de spectacle sur lequel deux circassiens tête-bêche progressent verticalement pieds contre pieds.

Dix pour un

Autre trait de cette création : sa racine première est bel et bien le cirque. Ainsi, de nombreux numéros sont ponctués par les ricanements ou le haussement d'épaule d'un autre camarade sur le thème "moi aussi je peux le faire" ; évidemment, il n'en est rien : rire des enfants assuré.

La danse est aussi l'une des composantes du liant de ce travail avec de nombreuses parties chorégraphiées par Dave Saint-Pierre (Un peu de tendresse bordel, à la Biennale de la danse en 2008) : à plusieurs reprises, tous se mettent à l'unisson, accompagnant ou non une performance solo se déroulant dans les airs.

C'est lorsque ce show à l'américaine, à la bande son originale, parfois trop tubesque, se calme que la douceur affleure : le numéro d'un acrobate avec une jeune fille épouvantail (simple robe accrochée à un cintre) est touchant. C'est à ce moment-là que le cirque Eloize (créé en 1993) interroge son art, qui si maîtrisé soit-il, se fait tout petit face à l'amour. Belle humilité dans cette mécanique si bien huilée.

Cirkopolis
À la Maison de la danse jusqu'au samedi 22 octobre
Dès 8 ans


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