Le Disciple

de Kirill Serebrennikov (Rus, 1h58) avec Petr Skvortsov, Viktoriya Isakova, Svetlana Bragarnik…


Pris d'une crise mystique chrétienne de plus en plus aiguë, un lycéen jusqu'alors effacé devient une sorte de boussole morale qu'aucun adulte n'ose plus contester, maniant avec adresse foi dogmatique et connaissance littérale des textes bibliques. Une professeure ose encore l'affronter…

Voilà certainement l'un des films les plus adroits des dernières années consacré à un mécanisme de radicalisation individuelle : celui d'un ado complexé trouvant dans une singularité extrême le moyen d'exercer une tyrannie absolue, et d'inverser totalement son rapport au monde. Il montre également l'hypocrisie lâche et virale de la communauté adulte face à l'énoncé de sa “profession de foi” : au lieu de faire bloc pour en démonter les absurdités, elle se laisse contaminer avec délices, abondant pour légitimer des idées réactionnaires et réactiver un obscurantisme caché sous le tapis.

Kirill Serebrennikov nous prouve qu'un illuminé se réclamant d'une idéologie totalitaire, quelle qu'elle soit (religieuse ou politique) n'est rien d'autre qu'un détonateur agissant sur la société, ce baril de poudre faussement apaisé ne demandant qu'à s'échauffer par le discours. La parabole est, hélas, universelle et d'actualité. Brillamment réalisé et excellemment interprété.


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