Œuvres remises sur le métier

Un groupe de recherche de l'École des Beaux-Arts de Lyon (re)met au travail des œuvres d'art de toutes époques. Et présente les fruits de ses élucubrations très originales sous trois formes : un livre, une exposition et une rencontre.


Le groupe de recherche Art Contemporain et Temps de l'Histoire (ACTH à l'École Nationale des Beaux-Arts de Lyon), réunissant artistes et historiens de l'art, propose une alternative aux conceptions habituelles de l'histoire de l'art et de l'image, basées sur la linéarité et la succession d'époques (l'impressionnisme, le cubisme, le surréalisme...).

Avec ACTH, les œuvres dialoguent entre elles de manière anachronique, et s'ouvrent aussi à l'histoire politique, et, plus singulier encore, à l'histoire naturelle et à la géographie. La série de Vagues peinte par Courbet en 1869 résonne, par exemple, avec un film expérimental de l'artiste contemporain Michael Snow, et se voit reliée aux concepts "biologiques" de rythme et de cycle, ou avec des faits historiques tels que la Commune de Paris et la destruction de la colonne Vendôme.

Résonances

Inspirés par l'historien de l'art Aby Warburg, le philosophe Walter Benjamin ou encore par la psychanalyse, nos chercheurs-expérimentateurs ouvrent ainsi nombre d'œuvres et d'images à des horizons inattendus, zigzaguant entre art, réel, sensibilité, imaginaire, pensée... Et proposent moins, dans leur livre et leur petite exposition (assez difficile d'accès, soit dit en passant, si l'on ne lit pas attentivement les textes qui l'accompagnent), des conclusions que des hypothèses de travail, des lignes d'horizon, de nouvelles approches à la fois intellectuelles et matérielles.

L'œuvre n'est plus ici seulement la représentation d'une idée préalable ou l'expression de la sensibilité d'un artiste, mais elle devient un champ de résonance et d'expérience qui concerne des manières de pensée collectives, des chocs traumatiques historiques, un environnement physique...

Au niveau collectif, l'art prend la "fonction" que le rêve exerce au niveau individuel pour un psychanalyste comme Maurice Dayan : les images de nos rêves lient notre présent au passé et à l'inconscient, nos idées et nos affects, et même proposent quelques solutions à nos traumatismes, névroses, inhibitions... Il y a de la pensée "impersonnelle" dans les images du rêve comme dans les images des artistes qui dépassent les personnes physiques qui les produisent !

Le temps découpé en son lieu (2)
À l'École Nationale des Beaux-Arts de Lyon jusqu'au 17 décembre

Le Temps suspendu, sous la direction de Giovanni Careri et Bernhard Rüdiger (éditions Presses Universitaires de Lyon)
Rencontre autour de l'ouvrage à la Galerie Michel Descours le jeudi 15 décembre à 19h


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