T2 Trainspotting

Vingt ans après avoir entubé son monde, Mark règle ses dettes avec les intérêts. Quant à Danny Boyle, il fait sagement fructifier le capital sympathie de ses défoncés en dealant du shoot visuel et sonore aux quadras nostalgiques de leurs vingt ans. Une honnête rechute.


Saisi par le remords (entre autres impérieuses raisons), Mark Renton quitte sa planque d'Amsterdam et retourne à Édimbourg où Sick Boy semble prêt à tout lui pardonner, à condition qu'il l'aide à ouvrir un bordel. Mais le pire est à craindre : Begbie s'est évadé de prison…

Souvent, la suite tardive d'un succès “générationnel” se révèle honteuse ou paresseuse — on s'abstiendra, par charité, de rappeler les exemples des Inconnus, des Bronzés, de Trois Hommes et un couffin ou de tant d'autres merveilles. Montées pour de mauvaises raisons (aisément d€vinab£€$), elles déçoivent leurs fans transis, qui n'osent pas s'avouer désappointés devant le naufrage de leurs illusions. Sans scintiller ni déchoir, Trainspotting 2 peut se targuer d'être une “bonne” suite.

On se ca(l)me !

Boyle donne ce qu'ils attendent à ses clients : il prolonge les péripéties de sa bande presque assagie de junkies en usant d'une intriguette prétexte à une suite de sketches parfois réussis — la méthode a jadis fait ses preuves dans les Don Camillo. Il ne se risque pas à la surenchère trash ou destroy ; le ferait-il qu'il tomberait dans un montage à la Jean-Marie Poiré. En faisant exister T2, le réalisateur accomplit la promesse (certes jamais formulée à l'époque) de montrer la résultante des choix qui tourmentaient tant Renton et ses potes en 1997. Son film se trouve ainsi criblé de surgissements, citations ou références au premier opus — tant pis pour ceux qui ne l'ont pas vu — ; bien planté dans son présent, mais hanté en permanence par les patachonneries du passé.

Comme les protagonistes et les interprètes, le public vingtenaire de 1997 s'est mangé vingt ans dans les quenottes (plus toutes d'origine, d'ailleurs) ; comme eux, il se découvre chaque jour semi-vieux, nostalgique et se hait d'être devenu responsable, à son corps défendant. Trainspotting 2 sera pour lui pareil à un dernier shoot d'inconséquence. C'est certainement une escroquerie ; au moins est-elle inoffensive…

T2 Trainspotting de Danny Boyle (G-B, 1h57) avec Ewan McGregor, Jonny Lee Miller, Ewen Bremner, Robert Carlyle…


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