Nos corps tissés de mots

Le dramaturge Valère Novarina est invité pour un grand entretien à la Fête du livre de Bron. Une œuvre majeure à (re)découvrir à cette occasion, où le langage et sa chair poétique sont le personnage principal.


Depuis le début des années 1980, Valère Novarina poursuit une œuvre dramatique poétique et singulière. Il est, sans doute, ce qui est arrivé de plus déroutant et de plus créatif au théâtre contemporain aux côtés d'un théâtre du corps (Jan Fabre et la scène flamande) et d'un théâtre lyrique de l'extrême anglo-saxon (Edward Bond, puis Sarah Kane et beaucoup d'autres, scrutant la violence, la guerre, la folie...).

Dramaturge et metteur en scène, Novarina a présenté la plupart de ses pièces au TNP à Villeurbanne, de L'Acte inconnu à, très récemment, Le Vivier des noms... Il vient de publier Voie négative, ensemble de textes de théâtre et de réflexions sur le langage. Car c'est bien de cela, du langage, dont parle et qu'entreprend de sonder jusqu'en ses confins et ses replis inconnus Valère Novarina : « La langue est notre autre chair vraie. Nous sommes tressés par son architecture invisible, mus par le croisement et le combat des mots ; nous sommes nourris de leurs intrigues, de leurs jeux, de leurs dérives, pris dans leurs drames. Nous, les Terriens - nous les "Adam", les bonhommes de terre -, nous sommes formés de langues tout autant que de tendons, de muscles et d'os. »

Le souffle de la parole

Dans cette citation, il faut entendre combien Novarina (qui est né en 1947 à Genève) fait résonner les mots avec le corps, les intriquent l'un à l'autre. Et l'on comprend dès lors qu'il est un homme de théâtre : là même, sur scène, où les mots et le corps sont en "jeu" l'un pour l'autre, l'un contre l'autre...

Il ne s'agit pas seulement, dans ses œuvres, d'explorer sa langue maternelle, mais toutes sortes de langages (l'argot, l'administratif, le savant, le patois, le cru...), de creuser toujours plus avant les galeries du langage, jusqu'à sa sensibilité même, faite de souffle, de rythmes, de sons, de textures... Le sens se noue et se dénoue, quelque part entre corps et langage, avec la sensation.

« Les mots vont profond : ils murmurent dès qu'on les touche et s'ouvrent sur des paysages engloutis ; ils dévoilent souplement, dans leurs jeux, les mouvements de l'onde et de la parole... Il y a une géologie charnelle, une histoire animale, une sexualité et des jeux de séparations et d'unions vivantes en chacun des mots. »

Grand entretien avec Valère Novarina
À L'hypodrome de Parilly le samedi 11 mars à 18h


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