Expo "Popcorn" : le design à l'écran

À l'occasion de la Biennale du design, le Musée d'art moderne et contemporain de Saint-Étienne jette un regard croisé sur les liens entre design et cinéma... Une exposition restreinte à peu de salles mais digne d'intérêt.


Moins importante en quantité que nous l'espérions, l'exposition Popcorn est cependant une exposition réussie sur le plan qualitatif. Elle entrecroise art, cinéma et design en trois temps, respectivement dédiés aux thématiques du travail, de la conquête spatiale et du western.

Rappelons que le design et le cinéma sont nés à peu près en même temps (en 1851 pour le design avec une exposition au Crystal Palace à Londres défendue par Sir Henry Cole ; en 1895 pour le cinéma avec la première projection des frères Lumière) et qu'ils partagent, à leurs débuts, la même réputation de sous-disciplines artistiques.

Le cinéma est rattaché aux attractions et spectacles forains et le design au monde un peu sombre et encrassé de la technique et de l'industrie ! Bref, c'est en sortant peu à peu des "bas-fonds" que le cinéma comme le design gagneront leurs lettres de noblesse, qui ne sont plus remises en question aujourd'hui...

Le travail à l'œil

Bizarrement, c'est la partie la moins fun de l'exposition (comparée au glamour du western et aux rêveries quasi enfantines de la conquête spatiale et des voyages sur la Lune) qui a le plus retenu notre attention : celle dédiée au travail et à ses espaces, et tout particulièrement aux premières expérimentations cinématographiques à la fin du 19e et au début du 20e siècle. 

À ce moment de bascule entre deux siècles, ingénieurs, cinéastes et autres artistes se saisissent (parfois avec fascination) du travail à la chaîne et de divers procédés allant vers la mécanisation... Le photographe Eadweard Muybridge utilise la chronophotographie pour étudier les secrets du mouvement humain ou animal. Les époux Lilian et Frank Gilbreth filment quant à eux, avec le plus de précision possible, les gestes d'ouvriers plongés dans des dispositifs tayloristes...

Nous sommes à la fois subjugués et effrayés par ce regard porté sur un travail somme toute inhumain, et visant à l'améliorer : en réduisant l'effort certes, mais en visant aussi à augmenter cadence et productivité ! Science, technique et cinéma s'assemblent alors pour transformer le sujet humain en simple maillon inscrit dans une vaste chaîne... Aliénation que Chaplin dénoncera avec drôlerie dans les Temps modernes.

Popcorn (art, design et cinéma)
Au Musée d'art moderne et contemporain à Saint-Étienne jusqu'au 17 septembre


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