Benjamin Bruneau : les images de l'intranquillité

Le galeriste Henri Chartier reprend son activité à Lyon avec un nouveau lieu et une nouvelle exposition, consacrée à Benjamin Bruneau. Un peintre méconnu qui met l'image sous tension et la confronte à son refoulé.


Bonne nouvelle ! La galerie Henri Chartier, après trois ans d'absence, rouvre ses portes dans un nouveau lieu, rue Auguste Comte. L'espace d'exposition est à la fois coquet et modeste en surface, et le galeriste espère y poursuivre la ligne artistique impulsée dans ses deux précédents lieux sur les pentes de la Croix-Rousse : des artistes souvent écorchés vifs, pas toujours sous les feux de la rampe, dont les œuvres déploient des univers étranges, sensibles, dénués de toute esthétique pompeuse... Tels, par exemple, Philippe Jusforgues et ses curieux photo-collages quasi dadaïstes, Grégoire Dalle et ses dessins labyrinthiques fourmillant de détails, Caroline Demangel et ses corps et visages tourmentés...

Dissonances

La première exposition rue Auguste Comte est consacrée à un artiste qui a très peu présenté son travail jusqu'à présent. Benjamin Bruneau est né en 1974 à Montpellier, a été formé aux Beaux-Arts de Paris à l'atelier de Jean-Michel Alberola, et déploie, depuis, un monde pictural que les critiques désignent souvent comme baroque ou surréaliste. Le peintre n'hésite pas, par exemple, à singer Poussin, Ingres ou Le Bernin tout en intégrant à ses tableaux des éléments ultra contemporains, ou des personnages mi-travestis mi-monstrueux. Il transfère aussi directement sur ses toiles des éléments "extérieurs" photographiques, et s'emploie à gratter, voire à écorcher la surface de ses œuvres...

Il en ressort des images "impures" (teintées d'humour aussi) où les choses ne cessent de se déplacer et d'être poussées vers leur point de rupture: des régimes d'images différents, des références historiques différentes, et surtout des figures qui basculent souvent vers l'informe (la tache, la matière brute, le spectral...). 

À partir de ces dissonances, de ce voisinage quasi impossible entre le réel et ses fantômes, la figure et son refoulé, Benjamin Bruneau parvient à composer d'étonnantes images intranquilles.

Benjamin Bruneau, Le voyage immobile
À la Galerie Henri Chartier jusqu'au 17 juin


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