Costa-Gavras, acte 2 : Nos culpabilités


On aurait envie de parler de deuxième round tant l'œuvre de Costa-Gavras compte de coups de poings et de coups de force cinématographiques. Réunissant ses longs-métrages tournés entre 1986 et 2012, ce coffret prend la suite des “années Montand” et étrangement, coïncide avec la première cohabitation — donc la déception de la gauche mitterrandienne. 

Après deux films américains, Costa revient en France avec une comédie policière interprétée par un Johnny Hallyday inattendu, Conseil de Famille (1986). En souterrain, il interroge le déterminisme social et déjà, le sentiment de culpabilité qui contamine profondément la suite de son œuvre. Jamais procureur ni juge, le cinéaste met en lumière des tendances ou des faits sous des prismes insoupçonnés. Ce sont d'abord les spectres de l'extrême-droite et du nazisme, à rebours, à travers ses rejets contemporains dans La Main droite du diable (1988), puis Music Box (1989) mettant face à face présent et passé, et enfin Amen. (2002) qui plonge au cœur de la machine hitlérienne et de l'incurie vaticane. C'est ensuite l'horreur économique, et des variations autour des conséquences d'une société de la surperformance où le chômage rode : prise d'otage dans Mad City (1997), meurtres dans Le Couperet (2005), quête d'un asile dans Eden à l'ouest (2009), individualisme cynique dans Le Capital (2012). 

Un film reste à part, le rare La Petite Apocalypse (1992), très mal reçu à sa sortie. Cette fable, dont la distribution et le sujet pourraient évoquer Resnais (de la même manière que Clair de femme faisait penser à Sautet) se déguste comme un nectar aujourd'hui, car l'on comprend que les soixante-huitards embourgeoisés n'aient pas apprécié le portrait corrosif qu'il leur renvoyait. À revoir donc, de toute urgence.


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Costa-Gavras : « Il faut aller à l’utopie ! »