Sous le voile : Arzu Başaran

Regard Sud et l'association Muscari qui diffuse et valorise la culture arménienne présentent le travail nécessaire pour la réconciliation des peuples de l'artiste turque Arzu Başaran.


Migrer contre son gré, être arraché à son foyer, à sa terre, être séparé des siens. Voici ce que raconte Arzu Başaran dans son exposition Still there. Des actes de déracinement que les médias rendent familiers, mais dont la réalité nous échappent bien trop. C'est sous le voile du génocide arménien que la Turquie n'a pas encore levé, que cette artiste turque s'est glissée. 

Il aura suffi d'une conférence historique sur l'Arménie en 2004 pour qu'Arzu Başaran prenne conscience du sort que ce peuple voisin a subi en Turquie au début du 20e siècle. Déportation, famine, un massacre planifié dont on tait le mot depuis. Génocide. Un mot tabou, un mot pour qui le prononce fait foi d'un engagement. « C'est le contact humain qui m'a permis d'en prendre conscience. Je ne pouvais pas rester indifférente » nous dit-elle devant ses toiles blanches où des personnages errent dans le néant. 

L'artiste commence à se documenter, se procure des photos et son humanité parle et devient de plus en plus bavarde. « J'avais du mal à confronter mes amis arméniens, j'avais honte. » En 2008, elle peint une première toile sur le génocide et se rend sur le mémorial, très vite intervient la volonté de faire une exposition qui prendra place en 2017 dans une galerie d'Istanbul. Still terre… (2017,  Istanbul) fut très bien accueillie par « un public démocrate et ouvert sur le monde comme il y en a beaucoup en Turquie. » 

Au fil de la visite, la douceur de la blancheur s'estompe, remplacée par l'âpreté d'un gris comme une empreinte anonyme. Les toiles d'Arzu Başaran sont éloignées de toute violence frontale malgré la dureté du sujet qu'elle traite. Elle parvient à symboliser avec humanité l'intemporalité du déracinement et de ces marches qui n'ont de but que la fuite vers le vide.  

Arzu Başaran,  Still there

À la galerie Regard Sud jusqu'au 2 juin


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