Redynamiser les Ateliers

En 2015, Joris Mathieu prenait la tête d'un Théâtre des Ateliers moribond ; rapidement après, il obtenait la direction du Théâtre Nouvelle Génération à Vaise et rattachait le premier au deuxième, en en faisant une seule et même entité. Alors que les tutelles lui ont accordé un second mandat qui le mènera jusqu'à fin 2021, il nous explique ses ambitions pour cette (double) salle.


Quelle place spécifique avaient les Ateliers dans votre projet de CDN ?
Joris Mathieu
: Depuis le départ, il y a l'idée de ce qu'on va lancer de manière beaucoup plus franche dès janvier : un vivier, l'association avec des artistes que l'on peut qualifier d'émergents, même si je n'aime pas trop ce terme, associés sur des phases longues avec des temps de recherche en amont suivi d'accompagnement en soutien aux productions. La logique du projet est de se dire qu'on a la chance de vivre dans une métropole culturelle très dense et qu'il faut soutenir de façon plus constructive les équipes artistiques, locales et nationales : nous sommes un Centre Dramatique National.

Ce vivier existait déjà avec Catherine Hargreaves...
Oui, mais c'était une première expérimentation en accompagnant une artiste pour qu'elle puisse développer son travail en lui donnant de la visibilité. On poursuivra ce processus en mettant en place deux choses : accompagner non pas un seul artiste, mais a priori quatre (deux issus de la métropole et deux autres plus nationaux, mais c'est encore en cours de discussion).

Un des problèmes des Ateliers est qu'il est assez peu ouvert, même si un tiers de la programmation de la saison 2017-18 du TNG s'y est déroulée. Quelle sera la place du public à l'avenir ?

Il y aura des ouvertures d'ateliers à partager avec le public, des rendez-vous qui seront à inventer par les artistes pour rencontrer le public (lectures, présentation du projet...) et leur production sera diffusée dans nos murs. Concernant l'ouverture des Ateliers, elle sera plus importante que cette année avec plus de spectacles mais sachant que autant à Vaise qu'aux Ateliers, nos missions premières sont celles de la création, pas de la diffusion.

Comment alors prendre le relais de ce qui est présenté dans les scènes découvertes dans une ville qui manque de salles intermédiaires ?

Je suis très en adhésion avec leur travail et leur soutien à l'émergence mais nous ne voulons pas importer le modèle économique de ces lieux dans l'institution. On ne doit pas être dans une logique où l'on fait venir des compagnies qui ont besoin de visibilité, d'expérience pour leur proposer des conditions qui irait d'un accueil à la recette à la co-réalisation. Notre travail est de redéployer nos moyens pour que ces compagnies puissent en avoir plus afin de produire leurs œuvres et si on se risquait à cela – on est sollicité extrêmement souvent – on alimenterait la paupérisation. Or on doit garder cette exigence d'un même accompagnement aussi bien aux équipes nouvellement repérées ou aux artistes déjà bien installés.

Ces deux salles des Ateliers (de 180 et 90 places) sont faites pour des projets de ce type-là mais seulement si on est dans un accompagnement régulier de l'accueil de ces compagnies, en achetant les représentations, en accompagnement des résidences, on a très peu de recettes de billetterie sur ces spectacles donc ils coûtent plus chers. C'est la même problématique qu'ont les Célestins avec la Célestine.

Notre rôle de CDN structurant les équipes qu'on accompagne demande du temps et des moyens. On va maintenant rentrer dans une autre phase. Durant le premier mandat, il a eu des travaux sur le bâti pas forcement visible (remise aux normes de sécurité, etc). Ce lieu va désormais être habité par des artistes associés dans la durée.

Parallèlement au vivier, il y aura un second dispositif (sur appel à projets) qui s'adressera à de très jeunes professionnels : la Classe-ville, clin d'œil à La Classe morte de Kantor. Ça va être une approche un peu différente pour l'accompagnement des premières œuvres. Sur une année complète (janvier – décembre 2019), ils vont bénéficier de cinq workshops menés par les artistes du vivier et ma compagnie Haut et Court pour leur permettre de découvrir des méthodes et des approches d'écriture de spectacle différents, des outils de travail... On est dans une classe d'apprentissage par le faire, l'action, la pratique. Ce que le public pourra voir est encore en cours de définition, mais l'idée est qu'en fin de parcours, ces jeunes artistes puissent bénéficier d'un temps de résidence sur le plateau assez court qui aboutira à la présentation d'une maquette en cours de projet à partager avec le public sous la forme d'un événement de plusieurs jours qui ponctue l'année ; on ne l'a pas encore formalisé. Et de septembre à décembre 2018, il y aura des accueils de spectacles.

Les Célestins ne pourront pas exploiter la Célestine durant toute la saison prochaine, victime de la crue de la Saône,  est-ce que potentiellement vous pourriez accueillir certains de leurs spectacles comme vous l'avez fait ces derniers mois ?
Ils viennent de nous solliciter, on va étudier la question mais notre planning d'occupation des salles est très chargé ; ça paraît compromis, voire impossible. Mais c'est aussi le signe qu'il y a de plus en plus d'activités aux Ateliers.


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