Ça métisse dans les cuisines !

« Certaines régions sont en train de se déconstruire parce qu'elles sont submergées par les flux de demandeurs d'asile », déclare un ancien maire devenu ministre. OMG : la gastronomie lyonnaise va finir démantelée, éparpillée ? À moins que des initiatives comme le Refugee Food Festival offrent un nouveau sens au titre, un poil périmé, de capitale mondiale de la bonne bouffe...


Après une première édition française en 2016, une seconde européenne l'année dernière, les parisiens de Food Sweet Food, Marine Mandrila et Louis Martin, auteurs d'un remarqué Very Food Trip (Planète+ pour la série, La Martinière pour l'ouvrage), internationalisent cette année leur Refugee Food Festival.

En ce mois de juin – le 20 étant la journée mondiale des réfugiés – des restaurants de New York, Athènes, Bologne, San Francisco ou Cape Town bouleversent leurs menus et accueillent des cuistots en exil. Certes, Brooklyn c'est un peu loin pour aller manger afghan [on invente : le programme n'est pas encore disponible au moment où nous bouclons], mais heureusement, Lyon accueille aussi l'événement.

S'engager

Ceci grâce à Claire Fournier et Clara de La Fonchais qui portent le projet bénévolement – c'est ainsi que fonctionne le RFF – et la collaboration de restaurateurs qui invitent, l'espace d'un ou deux soirs, des chefs étrangers ayant récemment obtenu l'asile en France. Ainsi, on retrouvera aux Mauvaises Herbes, le restaurant végétal de la rue du Jardin des Plantes, Aicha Mahamet Seid qui revendique une « cuisine du Sahara », et ce pour deux dîners (les 13 et 14 juin). La cheffe tchadienne prépare un menu (autour de 21€) en collaboration avec les deux cuistots du lieu (Virginie Militon et François Allemand). Ces derniers soulignent l'enrichissement mutuel : « on fait normalement une cuisine vegan, sans gluten et sans sucre, ce qui pousse Aicha à s'adapter, ce sera donc une cuisine du Sahara disons, revisitée. De notre côté, on se retrouve à cuisiner des choses inhabituelles, à utiliser des épices qu'on ne connaissait pas. » Leur démarche vise au-delà de l'échange de recettes : « on est un resto engagé sur les questions environnementales, on a envie de le faire sur les questions sociales aussi, ça nous tient à cœur. » On pourra aussi découvrir la cuisine de chefs et de cheffes afghan, syrien, malaisien et bangali, respectivement chez Ravigote, Le Ballon, Café Arsène et Johnny's Kitchen.

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Les trois ambitions du festival : changer le regard sur les exilés, car « derrière chaque personne réfugiée, il y a un homme ou une femme passionnée », favoriser l'insertion professionnelle, et la rencontre autour d'un bon repas. La bande de Food Sweet Food et leurs relais dans la quinzaine de villes qui accueillent l'événement veulent croire que la bouffe « est le dernier rempart contre la barbarie », ce qui peut paraître un tout petit peu exagéré, et permet de partager « ce qui est à la fois le plus singulier » (l'interprétation d'une tradition culinaire) et « le plus universel » (partager un repas), et ça, c'est bien vrai.

Espérons que le Refugee Food Festival, en offrant à goûter d'autres cultures à des Lyonnais qui ont en haute estime la gastronomie, aidera à combattre les préjugés. Et rappellera que Lyon n'est pas seulement la ville de l'auteur de la loi Asile et Immigration...

Refugee Food Festival
​Du 13 au 17 juin chez : Les Mauvaises Herbes, Ravigote, Café Arsène (Garet et Vaubecour), Le Ballon, Johnny's Kitchen et Pourquoi Pas
Menus de 18 à 25€


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