YAO

De Philippe Godeau (Fr-Sen, 1h44) avec Omar Sy, Lionel Louis Basse, Fatoumata Diawara…


Petit Sénégalais de treize ans, Yao vénère la star européenne Seydou Tall, au point de connaître son livre par cœur. Apprenant que l'idole est de passage à Dakar, Yao fait les 400km séparant son village pour le rencontrer. Touché (et poussé par le destin), Seydou décide de le ramener chez lui.

Il s'agit là clairement d'un conte où le voyageur pensant maîtriser son cheminement se trouve “voyagé“, guidé par des forces de plus en plus pressantes à accomplir une mission initiatique à laquelle il n'était pas préparé. Dans ce récit, Yao n'est pas le héros mais le déclencheur inconscient, l'adjuvant à travers lequel le fatum va se manifester pour infléchir la trajectoire de Seydou ; un cicérone malgré lui tirant par ailleurs des leçons profitables de son escapade.

Godeau et Sy ont tenté manifestement d'éviter le “folklorisme“ tout en préservant un certain réalisme dans la vision du pays. Toutefois, il ne faut pas non plus s'attendre à une vérité documentaire : la caméra ne reste pas assez longtemps pour cela, c'est l'histoire qui le veut… et le genre road movie, qui lui aussi effectue une manière de retour aux sources.

Né peu ou prou à la fin des années 1960 aux États-Unis, le road movie a aussitôt trouvé en Afrique (et notamment au Sénégal) l'immensité constituant sa matière première : Touki-Bouki (1973) de Djibril Diop Mambety, Cocorico Monsieur Poulet (1974) de Jean Rouch… Explorant la distance pour relativiser la durée et surtout transmettre des valeurs aux deux compagnons de route, et en dépit d'une forme de naïveté (sans doute assumée), Yao s'inscrit à sa manière dans cette filiation.


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