SMAC : les musiques actuelles voient triple

En décembre dernier, trois salles de l'agglomération lyonnaise, L'Épicerie Moderne, le Périscope et le Marché Gare ont obtenu de la DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles) le statut de SMAC (Scène de Musiques Actuelles), une première dans le Rhône – et une bonne nouvelle – qui s'inscrit dans la suite logique de la S2M, projet collectif de préfiguration lancé il y a quatre ans.


«C'est un peu notre cadeau de Noël », s'enthousiasme François Jolivet, directeur de l'Épicerie Moderne de Feyzin, au sujet d'une décision qui a été annoncée à la veille du 25 décembre. Celle de la labellisation SMAC de trois salles de l'agglomération par la DRAC : l'Épicerie Moderne donc, mais aussi à Lyon le Marché Gare et le Périscope. Cela fait donc trois SMAC d'un coup dans un département, le Rhône, qui n'en comptait jusque-là aucune. La fin d'une anomalie en quelque sorte que Benjamin Petit, administrateur et programmateur du Marché Gare, tempère néanmoins : « le modèle originel du dispositif était surtout dédié à des territoires bénéficiant de très peu d'offre culturelle. On ne s'est intéressé aux grandes villes que dans un second temps, ce modèle ne pouvant alors pas correspondre à un territoire comme Lyon ». « La particularité d'un département comme le Rhône, c'est la diversité des acteurs et il n'y a pas trop de trois SMAC pour tenter de répondre par leur singularité et leur complémentarité aux attentes et au besoin du secteur. On n'oublie d'ailleurs pas le rôle que vont jouer tous les autres. » complète François Jolivet.

Des labellisations individuelles...

Les trois responsables des salles labellisées de saluer ainsi la finesse de la réflexion de la DRAC au moment de cette attribution. « Ils ont su tenir compte des spécificités de chacun », avance Pierre Dugelay, directeur du Périscope. Mais la décision vient aussi en quelque sorte valider, et c'est là « toute sa saveur » pour François Jolivet, le travail soutenu par la DRAC de préfiguration de la S2M, un dispositif de coopération datant de 2015, entre les trois salles labellisées et Bizarre! à Vénissieux – qui n'a pas obtenu cette validation – sur la base d'un projet de SMAC partagée comme il en existe sur certains territoires. En 2017, « les textes ont changé, précise Benjamin Petit, avec l'exigence qu'un label ne puisse désormais être attribué qu'à une seule structure juridique et autonome et l'abrogation du principe de préfiguration. »

Chacun a donc dû candidater individuellement, mais la période de préfiguration a sans aucun doute aidé à mettre les trois salles sur les rails de la labellisation. Ce qui implique que dans les faits, si le label, valable pour quatre ans, renouvelable et contrôlé par des comités de pilotage, vient sanctionner la dimension d'intérêt général de ces projets et leur implication sur leur territoire, cela ne changera pas grand chose au fonctionnement des salles. Salles qui, en plus, touchaient déjà dans le cadre de la préfiguration les subventions attribuées aux salles labellisées SMAC (100 000 euros par an chacune, subvention plancher du label).

…qui favorisent la complémentarité

« Ce sont des projets rodés en effet, ça ne va pas révolutionner notre façon de travailler, reconnaît François Jolivet, mais nous permettre de réfléchir à la manière dont on va évoluer. Après, il ne faut surtout pas voir cela comme une remise en cause de ceux qui n'ont pas été labellisés ou, pour nous, comme une médaille. » 

« C'est dans la ligne de quatre ans de travail qui ont servi à mettre à plat un projet, c'est un point d'étape qui valide cette période d'incubation » abonde Pierre Dugelay. « Notre contenu est déjà raccord avec le cahiers des charges et la labellisation grave dans le marbre nos obligations en matière de développement des musiques actuelles, précise Benjamin Petit, ce qui change, c'est l'officialisation d'un statut à caractère performatif : on devient un acteur reconnu par l'action publique comme menant un projet d'intérêt public. Notre rapport aux collectivités dans l'application des politiques culturelles va changer. »

« En termes institutionnels, ajoute Pierre Dugelay, on se retrouve en effet au même niveau que les grandes institutions, les théâtres subventionnés, l'Opéra, nous sommes reconnus comme des interlocuteurs officiels. »

Quant aux subventions, elles poussent davantage selon les acteurs à des dispositions d'intérêt public que d'intérêt propre et favorisent la complémentarité des lieux. Car l'Épicerie Moderne, le Périscope et la Marché Gare entendent bien, sans renier leur identité mais au contraire en l'exploitant, continuer de renforcer cette complémentarité et travailler la main dans la main. En poursuivant une action entamée avec la S2M qui repose, comme le dit Benjamin Petit, « sur le désir et une volonté de faire ensemble ».


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