On purge Vitrac

Pour l'avant-dernière création de son mandat au TNP, Christian Schiaretti reprend le texte de Vitrac qu'il avait déjà travaillé à l'ENSATT en 2004 avec une partie de cette première distribution. Poussif.


À ré(entendre) au TNP le texte dada que Roger Vitrac écrivit en 1928, il paraît vieilli, jauni. Cet effet n'émane pas du presque siècle qui nous en sépare, mais de l'idée de le transposer dans les années 90 agrémenté des rengaines de Cabrel et Souchon, des visages de PPDA, Mitterrand, Sérillon et Arènes de l'info pour preuve. Le propos de cet écrivain qui avec Artaud fonda le théâtre Alfred-Jarry n'en est en rien éclairé. Si l'actualisation était de mise, au moins eut-il fallu le raccorder à aujourd'hui. Quoique cela ne soit pas obligatoirement gage de pertinence, comme Ostermeier le montre parfois ou comme Schiaretti le fit maladroitement avec sa version d'Ubu roi.

Donc, Victor, 1m80 et « immensément intelligent » a décidé, le jour de ses neuf ans, de dynamiter sa famille en mettant au jour toutes les hypocrisies de la bourgeoisie – la relation adultère de son père en premier lieu. C'est David Mambouch (qui vient de sortir un documentaire sur sa mère Maguy Marin) qui donne corps à ce gamin infernal, et il est dirigé vers toujours plus de bouffonnerie là où plus de retenue aurait pu faire entendre l'irrévérence du propos.

Valium

Surligner l'absurde de ce qui déjà dit voire montré est un écueil de cette adapatation. Ainsi le décor (parfait) signé une nouvelle fois Fanny Gamet est-il un plan dessiné au sol (et sans cloison) de l'appartement des Paumelle façon Dogville. Quand le vernis de la bonne société craque sous les coups de boutoir de Victor, les pièces s'écartent les unes des autres. Bien vu. Mais à quoi bon alors que les acteurs soient amenés à marquer tous leurs sauts de l'une à l'autre ?

De même que la bonne de la maison est une femme noire. Était-il vraiment nécessaire de la vêtir d'un boubou ? L'outrance ne sert pas cette pièce au vocabulaire délicieusement surréaliste dont Corinne Martin, dans le rôle de la petite fille malmenée et maline, fait,  elle, particulièrement sa nourriture.

Victor ou les enfants au pouvoir
Au TNP jusqu'au 30 mars


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