Lumière, papier, ciseaux

La galerie Henri Chartier présente pour la première fois à Lyon des œuvres de Jörg Gessner. Des œuvres faites uniquement de superpositions de feuilles de papiers japonais.


Ce soir-là, c'est à la bougie que l'exposition de Jörg Gessner est éclairée dans la galerie Chartier. Entre ombre et clarté vacillantes, l'artiste franco-allemand (né en 1967) raconte être parti plusieurs mois au Japon pour apprendre les techniques ancestrales des papetiers. Ancien tailleur et designer graphique, Gessner y est devenu... artiste. Au Japon, il découvre « l'âme du papier » et les interactions entre la lumière et sa surface. Dans ses œuvres, la lumière pénètre dans la matière du papier, s'y diffuse, s'y distribue aussi entre les différentes couches et superpositions de feuilles. Jörg Gessner peut utiliser jusqu'à une centaine de feuilles (jamais de colle) pour obtenir ce qui, dans un premier temps, s'apparente à une toile abstraite. Dans un second temps, on y décèle tout un jeu avec la lumière, des variations d'une grande richesse, une aura propre à chaque création… Et l'on pense aux toiles de Mark Rothko.

Vers l'essentiel

Grand lecteur et amateur d'écriture et de calligraphie, Jörg Gessner réalise ainsi des sortes de livres de lumière, de petits ou grands formats, parfois en polyptyques, parfois en séries… Séries qui peuvent décliner les phases de la lune, ou bien la clarté solaire au fil des saisons… Les feuilles du temps, titre de son exposition à Lyon dont le commissariat est signé par le frère Marc Chauveau, est un ensemble de livres lumineux et de fenêtres intimes s'ouvrant sur un infini indéterminé, dénué de toute trace symbolique ou de traits imaginaires.

Ce sont de singulières et discrètes rencontres entre des structures rigoureuses (la géométrie des papiers, la blancheur des surfaces, le cadre des œuvres) et de nappes lumineuses plus flottantes et libres. L'artiste crée à partir de presque rien, sans mots, sans couleurs ni signes, et c'est l'essentiel qui apparaît.

Jörg Gessner, Les feuilles du temps
À la Galerie Henri Chartier ​jusqu'au 6 avril


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