Ray & Liz

De Richard Billingham (G-B, 1h48) avec Ella Smith, Justin Salinger, Patrick Romer…


Lui est famélique et mutique ; elle, à tout point de vue, excessive. Il boit, elle fume. Vivant dans le quart-monde anglais des années 1980, ce couple dépareillé élève ses enfants à sa manière, entre maladresse, immaturité et désinvolture. Trois moments de leur existence relatés par leur fils…

En 1996, alors qu'il débutait sa carrière de photographe, Richard Billingham avait déjà consacré un travail à sa famille, rendant compte de son caractère “extra-ordinaire“. À l'époque, il avait pris conscience que cette démarche lui permettait de « [se] purifier (…) et dès lors avoir des relations normales avec les gens ». En transposant son histoire au cinéma, il parachève sans doute sa catharsis, sans jamais recourir aux grosses ficelles misérabilistes du pathos.

Construits par fragments — un reste des instantanés photographiques ? — volontiers contemplatifs donnant à la durée son épaisseur, ce récit tragi-comique suintant d'alcool artisanal ne rechigne jamais à inscrire des éclats de voix ou de rire dans son architecture. Vu à hauteur de pré-adolescent, il rend compte d'une haute précarité sociale comme de l'éveil du jeune observateur à la conscience de classe — notamment lorsqu'il découvre une famille non-dysfonctionnelle. Mais malgré les outrances auto-destructrices et auto-centrées des parents, Billingham dépeint une étonnante forme d'amour circulant dans ce foyer brinquebalant. Un film brut mais tendre sur un passé austère.


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Chanvre amérindien : "Les Oiseaux de passage"