Just Charlie

De Rebekah Fortune (G-B, 1h39) avec Harry Gilby, Karen Bryson, Scot Williams…


Jeune footballeur doué, Charlie Lindsay est repéré dans son club par un recruteur, au grand bonheur de son père qui aurait aimé être pro. Mais Charlie se sent mal dans sa peau : au plus profond de lui, il se sait femme. Quand son entourage l'apprend, les réactions divergent…

Il en va du football comme d'un culte en Angleterre (et tout particulièrement à Manchester) : on s'y consacre avec dévotion, on entre dans un centre de formation comme dans les ordres avec, outre l'ambition de faire triompher les couleurs de son Église/club, la promesse d'un paradis bien terrestre. Ce prérequis semble nécessaire pour comprendre pourquoi la “confession“ courageuse — en réalité, l'affirmation de son identité — de Charlie est perçue par certains proches comme la trahison d'un apostat. Pour son père, qui fantasmait une carrière par procuration, c'est une double peine : croyant perdre un fils et un futur glorieux, son rejet égoïste est aussi violent que celui des homophobes excluant Charlie… ou lui cassant la figure.

Girl de Lukas Dhont avait déjà l'an dernier, on s'en souvient, largement exploré la question de la dysphorie de genre ; Just Charlie s'y attelle à son tour sans la moindre redite, évoquant davantage les problèmes d'interaction avec la famille et les amis au moment de la bascule. Au-delà du choix déterminant de Harry Gilby, interprète d'une stupéfiante maturité pour ce rôle à la fois pudique et physique, Rebekah Fortune a su construire une histoire où les personnages déploient une appréciable complexité, nullement figés dans un manichéisme stupide, et où la tolérance n'est pas le privilège des sempiternelles oreilles.


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Bande à part : "Passion"