La meilleure des pizzas est aussi la moins chère

La rue des Pierres Plantées connaissait l'embouteillage du dimanche midi : celui des bruncheurs essayant d'entrer au Desjeuneur. Elle en connaîtra tous les soirs car à côté, Maria sert maintenant sans résa de simples et divines pizzas.


La margherita va à l'essentiel et on l'aime pour cela. Elle fut inventée par le peuple pour le peuple, comme dit l'adage – et non par un légendaire Raphaël pour impressionner une reine Marguerite (de Savoie). C'est sûrement parce qu'elle est simple, qu'elle se détaille, qu'elle se plie et se mange en faisant tout autre chose – marcher, regarder le sport à la télé et puis travailler, que la pizza a tant plu aux new-yorkais et donc au monde. Qui l'a lui tellement galvaudée que des Napolitains ont cru bon de la défendre, via une association (l'AVPN) qui prétend que la Verace pizza napoletana n'est que margherita (ou marinara, sans fromage), qu'elle fait 35 cm, que ses bords sont surélevés mais que sa pâte est fine, et qu'elle cuit une minute dans un four à 500°C. Amen.

Maria/Marion Bohé avait déjà commis ce restaurant, réconciliant la Croix-Rousse et ses pentes autour de copieux brunchs : Le Desjeuneur. Dans une autre vie, travaillant à NYC pour les Affaires Étrangères françaises, elle avait flashé sur Roberta's, la Mecque des pizzas de Brooklyn, et donc du monde hipster. Puis elle se passionna pour la cuisine, pour les brunchs londoniens, pour les brunchs croix-roussiens, et quand cela fit un an et demi qu'elle en servait, des brunchs, elle s'envola pour Naples pour apprendre de l'Association comment faire de Véritables Pizzas Napolitaines, qu'elle servirait dans un local déjà acquis, voisinant Le Desjeuneur. Comme elle ne fait pas les choses à moitié, elle a ramené, outre un tour de main, un pizzaiolo napolitain (Antonio Raiola), et un four qui va bien, l'un des deux seuls agréés par l'Assoc', en briques de Sorrente (de l'autre côté du Vesuve). Gros délire.

Écrabouiller les tomates San Marzano

Comme la vraie pizza, Maria c'est simple en apparence : une cinquantaine de places assises, certaines autour du fameux four de Campanie à la carapace de mosaïques bleues, le reste dans une salle arrière voûtée, meublée de mobilier chiné et à peine décorée. Sur le comptoir, 80 pâtons le midi, 110 le soir, façonnés jusqu'à épuisement. Dès 19h30 une file d'attente se forme sur le trottoir. À la carte seulement cinq pizzas, toutes nickel. Dont, bien sûr, la margherita, au prix max' auquel devrait être toute vraie pizza napolitaine : 6, 50€. Picard tremble sur ses bases.

Maria peut-elle répondre à cette question, la seule qui vaille : qu'est-ce qui fait une bonne pizza ? Vue la qualité des disques qui atterrissent sur ses tables : oui. Et on va partager le secret. Petit un : une bonne pâte faite uniquement de farine, d'eau, de levure et de sel, dont la recette varie en fonction du climat, et qui reçoit l'attention d'un bon pizzaïolo qui la fera lever à température ambiante une journée une seule. Petit deux, de jolis ingrédients à mettre sur la galette façonnée avec les mains, notamment un coulis de tomate fait lui-aussi avec les doigts, qui éclatent et écrabouillent les tomates San Marzano entières et pelées. Et petit trois : un four qui pourra engloutir la galette crue et la déglutir boursouflé et croustillante en quelques dizaines de secondes seulement. Démo en live chez Maria...

Maria
1-3 rue des Pierres Plantées, Lyon 1er
Du jeudi au lundi, dès midi puis dès 19h30
Pizzas de 6, 50€ à 12€, birra porreti à 3€ les 33cl


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