Tous les chemins mènent à l'homme : "Roads"

Après une friction familiale, Gyllen tout juste 18 ans, “emprunte“ en guise de représailles le camping-car de son beau-père et décide de rallier la France depuis le Maroc. Il embarque William, jeune Congolais en quête de son frère exilé. Leur route épique les mènera à Calais…


D'un extrême l'autre pour Sebastian Schipper qui, après le plan-séquence berlinois de Victoria (2015), se lance ici dans un road movie de 3000 km. Le défi kilométrique remplace le concentré temporel, mais le principe demeure, au fond, le même : raconter un “moment“ tellement décisif pour ses jeunes protagonistes qu'il est susceptible d'en conditionner l'existence entière. Transposition du roman de voyage initiatique, le road movie permet de télescoper paysages et visages, récit picaresque et drames saisissant ; bref d'offrir un concentré de vie qui “rode“ le jeune adulte : un hippie allemand bipolaire, des sans-papiers africains en détresse, une savonnette de haschisch, un père peu amène, des Français racistes, les assauts des forces de l'ordre sur les migrants contribueront donc à dégrossir Gyllen de son reliquat d'innocence — William, quant à lui, avait pris de l'avance…

Si Gyllen gagne en maturité et en conscience au fil du film, ce dernier suit une évolution parallèle : en se rapprochant de Calais et des réfugiés, la fiction se dilue progressivement dans un réel documentarisant ; Gyllen quitte un passé triste et inconsistant (juste évoqué au gré de quelques confidences) pour s'immerger dans le concret en devenant bénévole auprès des malheureux échoués. Il n'y a pas qu'Erasmus pour édifier la jeunesse…

Roads
Un film de Sebastian Schipper (All-Fr, 1h40) avec Fionn Whitehead, Stéphane Bak, Moritz Bleibtreu…


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