20 concerts pour l'automne

Sélection drastique, forcément subjective, des vingt concerts qu'il ne faut surtout pas rater en cette saison : suivez le guide.


Baptiste W. Hamon

Surprise : le plus français des countrymen, métis musical revendiqué de Townes Van Zandt et Jacques Bertin, trop méconnu à notre goût, est revenu il y a quelques mois avec Soleil, Soleil Bleu. Si l'on retrouve quelques balises country (l'ami Will Oldham / Bonnie "Prince" Billy est toujours de la partie), celles-ci jalonnent un territoire bien plus pop et orchestré. Et l'art de "l'écrivage" de chanson (le songwriting, quoi) de notre W., de prendre une nouvelle ampleur.

À Thou Bout d'Chant le jeudi 3 octobre


Metronomy

En rentrant en Angleterre pour accoucher de Metronomy Forever, l'ex-néo-parisien Joseph Mount semble avoir retrouvé le mojo tubesque partiellement égaré sur Summer 08, celui qui l'avait vu accoucher de Love Letters, Monstruous, The Look, The Bay ou Corinne, sur ses précédentes saillies. Bonne nouvelle quand on sait que Metronomy vient livrer tout cela avec la fantaisie scénique qu'on lui connaît dans ce bel écrin à delirium pop que peut devenir l'Amphi 3000.

À l'Amphi 3000 le vendredi 11 octobre


Brigitte Fontaine

Xavier Machault & Martin Debisschop

Alors que Brigitte Fontaine multiplie, à 80 ans, les embardées sous les feux de la rampe (un livre, une apparition dans un documentaire sur les femmes dans le rock, un nouvel album et donc une tournée qui passe par le Radiant), l'un de ses classiques d'avec Areski Belkacem L'Incendie est revisité sur scène et bientôt sur disque par Xavier Machault de Pelouse et son compère Martin Debisschop. Une double actualité fontainienne qui devrait combler le peuple kéké.

Au Radiant le mercredi 16 octobre
Au Kraspek Myzik le jeudi 10 octobre


The Pixies

Il y a l'événement et l'anecdote : les 30 ans du chef d'œuvre ultime des Pixies, Doolittle, et la sortie du petit dernier Beneath The Eyrie, quatrième disque post-reformation de belle facture mais qui peine à s'accrocher à la légende. Il y a l'évidence aussi que la tournée qui réunit les deux privilégiera sans mal le premier parce que c'est le lot des formations dont la carrière est derrière eux et que ça vaut toutes les nouveautés du monde. Même sans la bassiste Kim Deal ? À chacun de se faire une religion.

Au Radiant le dimanche 20 octobre


Shannon Wright

Avec le temps, Shannon Wright a fini par écumer toutes les salles lyonnaises (et assimilées) susceptibles d'accueillir un tant soit peu de musique. Et chaque fois, une petite armée de fidèles est au rendez-vous pour accueillir la prêtresse rock à la mèche et à l'âme toujours un peu vagues, touché par ses va-et-vient répétés entre la mise à nue totale et la pudeur bruitiste. C'est une Shannon une nouvelle fois adoucie que l'on verra cette fois, en sortie d'un album baptisé Providence, où l'ouverture du cœur s'accorde au déploiement discret des claviers.

À la Comédie Odéon le dimanche 20 octobre


Ilgen-Nur

Parfois présentée comme une Courtney Barnett alémanique doublée d'une slacker queen pavementienne défendant le droit des queers (rien que ça), et toujours comme l'étoile montante de l'indie rock d'outre-Rhin et de l'indie rock tout court, la jeune Ilgen-Nur (21 ans) ne se laisse enfermer par aucun qualificatif ni référence, soucieuse qu'elle est de ne pas privilégier le fond à la forme, de ne pas laisser une désinvolture apparente sombrer dans le j'men-foutisme lo-fi – du titre de son premier album, Power Nap, il faut retenir le "power". Un rien débraillée mais jamais négligée, et beaucoup plus sophistiquée qu'il n'y paraît, Ilgen-Nur a l'évidence complexe.

Au Sonic le jeudi 24 octobre


Tinariwen

Le blues et le rock touareg ont beau nous livrer chaque année de nouveaux avatars tous plus enthousiasmants les uns que les autres, il n'en demeure pas moins que les patrons, ceux par qui tout est arrivé, restent les vénérables (37 ans d'existence) Tinariwen. Jamais à court d'idées pour bousculer l'esprit ancestral de leur art, les hommes d'Ibrahim ag Alhabib sont allés, sur leur dernier disque, Amadjar, à la rencontre du violoniste fêlé et complice de Nick Cave, Warren Ellis. Et le résultat de figurer une sorte de western sahelien dont il nous tarde de voir la représentation sur scène.

Au Radiant le jeudi 24 octobre


Place Hubert Mounier

À Lyon, le regretté Hubert Mounier, qui a poursuivi magnifiquement et en douceur une carrière détonnante entamée avec L'Affaire Louis Trio, aura peut-être un jour une statue, ou son visage sur le Mur des Lyonnais. En attendant, voilà qu'on lui nomme une place à son nom. Une place en forme de disque-hommage à l'initiative de quelques acteurs de la scène lyonnaise (Les Chic Types, Stan Mathis, They Call Me Rico, Frédéric Bobin, Denis Rivet, Kent,  Joe Bel, Carmen Maria Vega, Buridane...) dont la sortie se double d'un concert-exposition (gratuit) avec tout ce beau monde.

Au Club Transbo le mardi 5 novembre


The Fleshtones + Jon Spencer & the Hitmakers

On pourrait le dire pour chacun des concerts de la saison Kaotique, mais on reconnaît bien là la patte et les marottes de Fabien Hyvernaud qui a repris depuis quelques mois les rênes musicales du réseau Ninkasi. Ici, le menu est sacrément copieux et garni de légendes garageuses avec The Fleshtones, idoles du genre grandies dans le culte d'illustres aînés des Standells aux Sonics dont ils gèrent l'héritage avec autorité. Et avec l'intenable Jon Spencer, alignant désormais les hits (autoproclamés) en solo, et un déhanché toujours aussi salace.

Au Kao le jeudi 7 novembre


Deerhunter

« Pourquoi tout n'a-t-il pas déjà disparu ? », dans l'attente d'une réponse à cette question empruntée au philosophe Jean Baudrillard qui donne son titre à leur dernier album (Why hasn't everything already disappeared?), Bradford Cox et son Deerhunter ont choisi de s'écarter d'un modèle sonique souvent encensé pour fouiller les entrailles de la beauté et des possibilités mélodiques de la pop. Et par là, une forme de vérité. Le résultat est aussi bouleversant de beauté que terrifiant dans son propos. À l'image de tout ce qui passe au filtre tordu du grand Cox.

À l'Épicerie Moderne le mercredi 13 novembre


Juan Wauters

Pour peu que l'on soit allergique à la musique sud-américaine (on en connaît), on conseille pour soigner ce mal, l'écoute prolongée de Juan Wauters. Un traitement tout en douceur tant la touche AmSudiste que cet Uruguayen de New York met dans son folk alternatif est subtile et cajolante. Pour le reste cet éternel vagabond, revenu en 2019 après quatre ans d'absence, avec pas moins de deux albums en 2019 – qu'il prend bien soin de détricoter sur scène, doit autant aux Beatles primitifs qu'au barde indé Jonathan Richman.

Au Kraspek Myzik le samedi 16 novembre


The Detroit Cobras

L'avantage quand on sort des albums de reprises ne contenant que des chansons enfouies dans les archives insondables du garage rock et de la soul, c'est qu'on peut aisément faire passer son œuvre pour totalement originale. Ce n'est pas le but visé par The Detroit Cobras mais le résultat est là. Et original il l'est, tant les Cobras, menés par leur chanteuse Rachel Nagy, font sonner leurs enregistrements, toujours live, comme des incunables savamment restaurés. Avec ce qu'il faut de canaillerie pour rendre l'aventure on ne peut plus glamour.

Au Kao le dimanche 17 novembre


Cate Le Bon

En 10 ans, Cate Le Bon a livré une œuvre aussi singulière que totalement passée sous les radars mais rarement tombée dans l'oreille d'un sourd – c'est elle et sûrement pas pour rien que Bradfox Cox est allé chercher pour produire le dernier album de Deerhunter. Ce, avec une propension considérable à se remettre en question comme sur l'ombrageux et confessionnel Reward, d'une beauté vibrante, entre avant-garde et tradition, no-folk et pop tordue, qui place la Galloise pop au même rang que ses plus illustres consœurs (PJ Harvey, Jessica Pratt). Et confrères.

À Grrrnd Zero (Marché Gare hors-les-murs) le mercredi 20 novembre


Derya Yildirim et Grup Simsek

Dans la même veine qu'Altin Gün mais depuis l'Allemagne et non les Pays-Bas, Derya Yildrim & Grup Simsek fait revivre l'âge d'or de la pop psychédélique turque. Rien de plus normal quand on sait l'importance de la diaspora turque outre-Rhin. Le résultat est, lui, tout aussi envoûtant que ce que propose Altin Gün, groupe par ailleurs ami, dans un entrelacs de "traditionals" turcs et de psychédélisme anglo-saxon circa les 60's surligné par le timbre divin de la chanteuse Derya.

À l'Épicerie Moderne le jeudi 21 novembre


Étienne Daho

Pour célébrer la réédition de son album préféré Eden, dont l'accueil l'avait quelque peu déçu, Étienne Daho a décidé de faire les choses en grand avec une tournée classieuse accompagnée d'une formation à cordes. Et à l'Auditorium, Daho met encore plus de petits plats dans des plats encore plus grands, conviant les musiciens de l'ONL à l'accompagner le temps d'un soir. Inutile de dire que pour les fans de Saint-Étienne, la soirée devrait avoir des airs de Paradis.

À l'Auditorium le samedi 23 novembre


The Chats

Leur nom ne dit sans doute pas grand chose à grand monde, ce qui n'est guère étonnant pour un groupe poussé à l'envers du monde, sur la Sunshine Coast australienne. Mais il commence, leur nom, à pétarader sérieusement dans le milieu du tatapoum où des vigies telles que Dave Grohl et Iggy Pop n'ont pas manqué de le repérer depuis 2017 et le sémillant Smoko. Et avec lui ce concept de pub punk dont The Chats se disent les inventeurs. Ce qu'on ne leur contestera pas tant leurs morceaux joués à fond de train fleurent bon le concours de descente de pinte.

Au Kao le dimanche 24 novembre


Stephan Eicher

Omniprésent sur scène dans toutes les configurations possibles, avec des machines automates ou un orchestre d'inspiration balkanique (Le Traktoreskar) et une beatboxeuse (Steffe la Cheffe) redessinant à tout coup sa discographie, l'Helvète errant était devenu fort rare sur disque (pour cause d'imbroglio avec sa maison de disques). Homeless Songs est ainsi son premier album original depuis 2012. Et bien sûr le chanteur fête la chose en s'accompagnant sur scène d'un ensemble à cordes, cette fois. Ce qui est rare Eicher.

Au Radiant le jeudi 28 novembre


Ludwig Von 88

C'est en 2016 que s'est reformé ce pilier de la culture alterno des années 80 pour constater que le culte dont il était l'objet ne s'était pas tari à mesure que les cheveux (les siens comme ceux de ses fans) avaient blanchi ou simplement chu. Et leurs nouveaux titres (comme Jean-Pierre Ramone ou Karmalpaga), car il y en a, publiés sur l'EP Disco Pogo Night, de se fondre avec les anciens (Houlala, Louison Bobet For Ever) sans qu'on ait tellement l'impression que le temps malgré tout, et les désillusions, sont passées par là.

Au Transbordeur le vendredi 6 décembre


Philippe Katerine

Du cinéma, beaucoup, des featuring, pas mal, quelque pastille fantaisie à droite à gauche (sa chanson pour le club de foot des Herbiers), comme pour Eicher on en venait à oublier que la raison sociale du doux-dingue vendéen était de faire des disques – et des concerts. Il nous le rappelle avec un nouvel album, Confessions, disque au long cours farci de prestigieux duos, à paraître le 8 novembre et une tournée qui nous rafraîchira la mémoire sur ses qualités d'entertainer scénique.

Au Transbordeur le jeudi 12 décembre


L'Épée

Au départ, ce devait être un nouvel album d'Emmanuelle Seigner – rare spécimen d'actrice authentiquement rock – bricolé par ses potes Limiñanas et emballé par le sorcier Anton Newcombe. Au final, c'est un nouveau groupe qui émerge du projet : L'Épée, avec ce casting premium déjà réuni pour le dernier album de Limiñanas (vous suivez toujours ?). Un objet néo-yéyé garage, sur lequel un autre compère, Bertrand Belin signe trois titres, qui dit d'emblée son nom : Diabolique. En concert ça ne doit pas s'ignorer.

À l'Épicerie Moderne le mardi 17 décembre


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