« Changer pour ne pas rouiller »

Artisan d'une country marquée par l'Americana, chantée dans la langue de Barbara, Baptiste W. Hamon s'en écarte pourtant sur le très beau Soleil, Soleil Bleu, ouvert à d'autres sonorités. Il s'en explique avant son passage à À Thou bout d'chant.


À l'écoute de tes disques, il semble que tu aies grandi avec dans une oreille une radio branchée sur la chanson française à l'ancienne et dans l'autre une platine vinyle diffusant de la country...
Baptiste W. Hamon :
Il y a un peu de ça, en effet. J'ai commencé à écouter du folk et de la country à 17-18 ans : Johnny Cash, Townes Van Zandt, John Prine. Je découvrais un monde qui me fascinait, des poètes extraodinaires. J'ai longtemps trouvé ringarde la vieille chanson française qu'écoutaient mes parents, jusqu'à me rendre compte que l'équivalent d'un Van Zandt ou d'un John Prine en France dans les années 60-70 c'était peut-être Barbara, Moustaki ou Reggiani. Ç'a été quelque chose de très libérateur, parce qu'écrivant alors en anglais, j'étais frustré par les limites que m'imposait une langue qui n'était pas la mienne, de ne pas pouvoir pousser le texte au plus loin. Grâce à eux j'ai pu commencer à m'exprimer vraiment.

Sur Soleil, Soleil Bleu, ton deuxième album, tu sembles néanmoins t'écarter de ce terreau purement country. Pourquoi  ?
À l'époque de L'Insouciance, je n'écoutais que de la country, j'ai enregistré à Nashville. Ça faisait donc sens de revendiquer mes influences américaines. Quand j'ai enregistré Soleil, Soleil Bleu, j'étais un peu moins monomaniaque et voulais éviter l'écueil d'un album trop similaire au premier. Et tout en gardant des choses qui rappellent l'Amérique, m'ouvrir à d'autres sonorités : des boîtes à rythme, du spoken word. Changer les recettes pour ne pas rouiller. J'écris mes chansons guitare-voix dans ma salle de bain et quand j'arrive en studio, je trouve un lieu d'expérimentation aux possibilités infinies qui dépendent d'un million de choses : des gens que j'ai choisis, de mes envies. Sur ce disque des choses assez magiques se sont produites qui m'ont permis d'emmener les chansons ailleurs.

Sur ce disque, on retrouve une nouvelle fois Will Oldham, une collaboration avec Miossec... Ce goût pour les duos est une démarche qui vient du folk ?
Je vois la musique comme un partage. Un disque représente un moment de ma vie. Et ce que je suis à un moment donné je le suis aussi grâce à des gens. D'où l'idée de demander à certains de ceux qui ont compté de travailler avec moi. Miossec m'a beaucoup encouragé, j'ai tourné avec lui, ç'a été une rencontre humaine extraordinaire et il adorait cette chanson, Hervé. Mais mettre son ego de côté et venir chanter la chanson du copain, c'est effectivement très folk (rires).

Baptiste W. Hamon,  Soleil, Soleil Bleu (Manassas/BMG)
À A Thou bout d'chant le jeudi 3 octobre


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