Pièges à regard

Claire Vaudey nous envoie dans ses décors peints aux couleurs incongrues et osées. Comme autant de petits théâtres où se jouent bien des aventures picturales.


Pour sa toute première exposition personnelle, Claire Vaudey (née en 1984 à Vénissieux, diplômée des Beaux-arts de Paris en 2009) ose tout : les roses vifs, les violets obscurs, les verts pâlichons, les jaunes qui phosphorent, et la répétition, de tableau en tableau, de décors intérieurs assez semblables les uns aux autres. À l'origine, il s'agissait de petites maquettes que l'artiste a réalisées à partir de baguettes, de fragments de papiers et de morceaux d'étoffes. Ces petits théâtres, une fois transposés et peints sur toiles, deviennent des espaces à la fois imaginaires et personnels dont les fenêtres n'ouvrent que sur des aplats de couleurs luminescents. Sans crier gare, Claire Vaudey nous entraîne dans le théâtre de la peinture elle-même, constitué de couleurs, d'ombres, de lumières et de surfaces. Son réalisme apparent est comme la mise en scène ou la mise en abyme de l'abstraction.

Glissements

Ce glissement d'un registre à l'autre, de la figuration vers l'abstraction, résonne avec d'autres de ses œuvres : du décoratif au vivant (plantes, fleurs), du dehors au dedans, du volume à la surface... Le regard, avec plaisir et admiration, ne cesse de se faufiler parmi les plis des œuvres, leurs interstices entre deux plans, leurs boîtes-fenêtres sans perspective. On est alors comme perdu dans des espaces pourtant très simples d'apparence, mais qui s'avèrent être de véritables pièges à regard. Les plus perspicaces découvriront ici et là quelques hommages discrets à Félix Vallotton, Édouard Vuillard, ou même à Vermeer et à Uccello. Ce travail fort singulier s'appuie aussi silencieusement sur une longue histoire de la peinture.

Claire Vaudey, Consonances colorées
À la galerie Pallade jusqu'au vendredi 7 mars


<< article précédent
Eh Mademoiselle !