Voici le plat de résistance

Comment la société urbanisée a pu nourrir la population croissante ? En traitant le sujet du plus global au plus local, d'hier à demain, la BM de Lyon signe une expo passionnante et dense.


Exposition moins fade que la Cité de la Gastronomie dont il nous reste, quelques mois après la visite, le gigantisme des volumes (ah, la splendeur que fut dès sa construction l'Hôtel Dieu !) et la faiblesse de ce qui est montré. Trop sommaire, trop simpliste, uniquement destiné à un public de touristes consommateurs. Ce n'est pas le cas de cette exposition Tous à table !, moins grandiloquente mais bien plus imaginative dans une scénographie plus cheap (des cagettes de bois destinées au transports de fruits et légumes) et limpide à la fois pour raconter en deux temps et dans deux espaces, l'alimentation dans les villes jusqu'en 2000 et ce qu'il va falloir changer à l'avenir pour continuer à nourrir ses habitants.

Piochées au fond d'archives de la bibliothèque, aux Archives, dans les herbiers de l'Université Lyon 1, au Musée Gallo-Romain, les sources se multiplient pour raconter comment le maire Édouard Herriot a initié la construction d'un (futur) lycée agricole dans l'Ain en 1918 afin de « former aux métiers de l'agriculture, moderniser les campagnes pour qu'elles nourrissent les villes. » Des exemples comme celui-ci, la BM en a d'autres et prouve que s'attacher à la nourriture c'est aussi embrasser la métamorphose d'une ville, l'arrivée des Algériens dans les années 60, la construction des HLM, le développement du tourisme gastronomique avec les congés payés et toujours la promotion du terroir via des affiches publicitaires reproduites en grand des flancs lyonnais ou des chocolats des 3 Frères.

C'est aussi le règne de la consommation de masse et des hypermarchés de ces Américains ou Vénissians qui poussent le même caddie dans le regard saisissant, en noir et blanc, d'André Gamet ou William Klein. La fameuse série de Peter Menzel photographiant une semaine de courses avec une famille des quatre coins du monde arrive à point nommé dans ce parcours pour résumer tout ce qui a précédemment été expliqué.

D'une halle l'autre

Dans une deuxième partie, les splendides cartes Deyrolle de la France des arbres fruitiers et des huiles oléagineuses côtoient une vidéo de Michel Serres édictant que « manger est un acte biologique, politique et sacré. » Et de voir comment une Métropole comme celle de Lyon peut subvenir aux besoins de son million et demi d'habitants. Sans être surchargée, la matière de cette exposition est d'une richesse incontestable tout en restant parfaitement digeste. Reste à prendre le temps de bien mâcher (et déambuler) pour mieux digérer cette vertigineuse proposition.

Tous à table !
À la Bibliothèque de la Part-Dieu jusqu'au samedi 21 mars


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