James Sacré, poète approximatif

James Sacré viendra à Lyon pour recevoir le Prix Kowalski de la ville. Une belle occasion de découvrir l'une des plumes des plus touchantes et des plus sobres de la poésie contemporaine.


Coup sur coup, les Figures de silences (éditions Tarabuste) de James Sacré ont reçu, en 2019, le Prix Théophile Gautier de l'Académie Française et le Prix Kowalski. Ce recueil tente de dire le(s) masque(s) des paysages traversés (aux États-Unis, au Maghreb, en France...), l'insoutenable légèreté des mots écrits... Ou encore la fête et le carnaval : « Carnaval de quelle vérité montrée / Dans le faux d'un masque et des gestes crus ? / On veut croire à de la fête, on caresse / La mort et son cul. » Chez James Sacré, le tragique gît dans le prosaïque, l'émotion dans le presque rien des choses et des êtres. Et rarement poète ne nous aura donné à ressentir ce vent du temps qui passe sur les mots et les choses jusqu'à, aussi intolérablement qu'en toute légèreté, les effacer : « À la fin des mots se perdent dans le silence / À la fin tout le dictionnaire se perd / Dans le silence du monde. »

« Poème comme un cul qu'ose pas se montrer nu »

À travers ces deux courtes citations du poète, on ressent d'emblée la simplicité de sa poésie, sa presqu'oralité, ses hésitations et approximations aussi modestes qu'ontologiques, sa limpidité qui ouvre sans coup férir quelques abysses concernant le réel, l'existence humaine, l'écriture, la parole... James Sacré boulange et pétrit les mots en résonance avec le travail paysan ou les vies simples qu'il a pu partager, observer enfant et jeune adulte en Vendée, puis dans le Massachusetts où il a longtemps enseigné, ou encore au Maroc, en Tunisie, en Italie... « Écrire se fait avec tout ce qui m'a pétri, dit James Sacré dans un entretien avec Serge Martin, avec tout ce que j'ai aimé ou parfois détesté, avec tout ce qui est venu par des lectures peu souvent programmées, souvent bien partielles... Et c'est en fait ce même désordre ou cette même incapacité de solidement construire, qui se manifeste dans ma relation vivante avec les choses du monde et les personnes rencontrées. » Sans pose ni afféteries formelles, James Sacré tente, mot à mot, pas à pas, de maintenir l'énigme « heureusement ou douloureusement vivante. »

James Sacré
À la Bibliothèque de la Part Dieu dans le cadre du festival Magnifique Printemps le samedi 14 mars à 11h


<< article précédent
Après Miss et James Bond, Pinocchio et La Daronne sont reportés