Stanley et Marcello sont dans une rétro

Le XXe siècle était-il à ce point jaloux de leurs talents ? Ni Marcello Mastroianni (1924-1996), ni Stanley Kubrick (1928-1999) ne franchirent sa limite, nous laissant avec des regrets… mais aussi nombre de chefs-d'œuvres qu'une double rétrospective à l'Institut Lumière nous convie à savourer.


En les voyant fêtés simultanément, on se dit que leur présence à un même générique n'eût pu produire davantage que des étincelles. Car même si Marcello Mastroianni est indissolublement lié à l'univers de Fellini, l'extraordinaire éclectisme de sa carrière naviguant de la comédie au drame aurait permis à ce génial caméléon d'endosser la plupart des rôles de Peter Sellers chez Kubrick, voire ceux de Tom Cruise, de Nicholson, de Ryan O'Neal, de Malcolm McDowell… et tous les autres figurant dans les (nombreux) projets inaboutis du cinéaste new-yorkais ! Ce fantasme de cinéphile, irréalisable, on le trompera avec du bien tangible : la (re)découverte des films de deux de plus importants contributeurs à l'art cinématographique du XXe siècle.

Master & Maestro

Pour Kubrick, présenter l'exhaustivité de ses longs-métrages (treize titres au total) n'a pas toujours été chose aisée, et l'on sait gré à cette programmation d'intégrer son premier opus Fear and Desire (1953), longtemps écrémé des intégrales. Tous les superlatifs ayant été usés pour évoquer le rigueur, la pertinence et le perfectionnisme de l'œuvre du maître, rappelons juste qu'à chaque fois qu'il abordait un sujet, un genre, une époque, c'était pour en proposer une vision appelée à en devenir la référence ultime ou le mètre-étalon : anticipation, guerre, science-fiction, horreur… Le cosmos audiovisuel créé par Kubrick façonne l'imaginaire du 7e Art depuis plus de soixante ans et ce n'est pas près de s'achever.

Plus complexe s'avère le choix des films retraçant le parcours de Mastroianni : dans la jungle internationale de plus de 150 œuvres, où le sublime cohabite souvent avec l'exceptionnel. Sans surprise, La Dolce Vita Huit et demi y trônent, mais aussi un aréopage de cinéastes balayant l'âge d'or du cinéma italien. Antonioni, Petri, Bolognini, Visconti (L'Étranger,  photo), Germi et naturellement Ferreri pour La Grande Bouffe (judicieusement placée entre les deux réveillons…) ou Scola pour Une journée particulière (une seule séance ce 1er décembre).

Plus rares — et donc méritant la réservation immédiate — La Peau de Liliana Cavani ou deux de ses plus grandes interprétations de la fin des années 1980 : dans L'Apiculteur chez Angelopoulos et Les Yeux noirs de Mikhalkov. Un itinéraire entre nostalgie, charme et élégance qui sera marqué en janvier par quelques soirées spéciales avec Marina Vlady et Jean A. Gili. Nécessaire.

Rétrospectives Marcello Mastroianni et Stanley Kubrick
À l'Institut Lumière jusqu'au 19 janvier


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