Jean-Paul Deniaud : « ça ne sert à rien de sauver la planète si on ne peut pas faire la fête »

Ancien rédacteur en chef de Trax Magazine, Jean-Paul Deniaud a récemment co-fondé Pioche!, un magazine en ligne et une newsletter dédiés aux nouveaux récits de l'écologie et à l'engagement du monde de la culture. Rencontre à quelques jours de sa venue à Hôtel 71.


Pouvez-vous nous présenter le magazine Pioche! ?
Jean-Paul Deniaud
: Pioche! est né en juin dernier. Mais le projet a germé quand j'étais rédacteur en chef de Trax Magazine. J'avais déjà envie d'aller plus loin et de parler de musique électronique pour parler de la société. À la faveur du Covid et d'une réflexion avec mon ami Calixte de Procé, on a eu envie de porter ce journalisme-là en faisant un média dédié à l'écologie. Pour en parler de manière positive, dynamique, d'une façon qui soutienne les projets locaux, à la manière de ce que l'on faisait chez Trax pour des collectifs de musique et des artistes, mais cette fois-ci avec des acteurs de l'écologie.

Pioche! appartient au journalisme de solution. Que répondre aux sceptiques qui reprochent à ce genre de récits une dimension utopique ?
Il faudrait leur répondre que le journalisme de solution part avant tout d'un problème... C'est au contraire un journalisme à la fois très réaliste et pragmatique sur les enjeux de demain. C'est identifier les problématiques pour réfléchir à des solutions au travers d'acteurs qui développent des initiatives, des pistes de réflexion… Notre manière de le faire est nourrie de reportages, d'enquêtes de terrain. Nous traitons de l'écologie en donnant la parole aux agriculteurs et aux vignerons, aux artistes aussi, ceux qui s'engagent dans leurs œuvres, des organisateurs de festivals…

Faire le pont entre culture et écologie 

Des reportages, des interviews au long cours… Quid de la dimension événementielle que vous évoquiez au lancement du média ?
Le projet a un peu évolué depuis le lancement. Au départ, il y avait cette idée de faire se rencontrer les gens au travers de petits événements près de chez eux. Finalement, c'est un peu le contraire. Les structures viennent chercher Pioche! pour organiser des conférences lors d'événements culturels. La ligne éditoriale s'affine, notamment sur l'engagement écologique du monde de la culture.

Beaucoup d'acteurs culturels s'efforcent de repenser leurs formats pour être plus vertueux. Comment faire cette transition écologique ?
La culture traverse une période très difficile avec la pandémie (annulations, reports, contraintes sur les économies déjà fragiles…). On pourrait se demander si c'est vraiment le moment de se remettre en question, de revoir ses process… En fait, Samuel Valensi de The Shift project le dit très bien : le choc émotionnel lié au Covid est le meilleur moment pour agir.

La fête pour éveiller les consciences

En 2016 chez Trax, vous titriez en Une « Peut-on faire la fête et sauver la terre ? ». Que répondre maintenant ?
Je dirais oui. Parce que ça ne sert à rien de sauver la planète si on ne peut pas faire la fête. La fête est un vecteur de communication et de sensibilisation incroyable. C'est un oui-mais. On ne doit plus faire la fête comme avant. Elle doit participer à éveiller les consciences, à découvrir, par exemple, des artistes locaux qui s'engagent, qui ne sont pas forcément des têtes d'affiche de l'autre bout du monde mais de la ville d'à côté. 

Quel constat faites-vous depuis que vous vous intéressez au lien entre culture et écologie ?
La culture a toujours été le fer de lance des luttes sociales et des enjeux de société. Ça a été vrai pour l'inclusion, pour le féminisme. Il y a une prise de conscience générale. Le monde de la culture est à la fois extrêmement résilient et il peut s'adapter, surmonter des épreuves incroyables. On sent que l'écologie irrigue les interrogations des acteurs culturels. Si même Roselyne Bachelot a élaboré une charte des festivals durables, c'est que ça commence un peu à bouger…

Jean Paul Deniaud, co-fondateur de Pioche!
À Hôtel 71 le jeudi 13 janvier à 17h30


<< article précédent
La compagnie Courir à la catastrophe s'offre une quinzaine aux Célestins