Le café Méta chez Fika

Une micro-torréfaction cachée dans l'arrière salle d'un coffee shop : c'est dans les pentes et c'est Méta, installée chez Fika.


La prolifération de nouveaux torréfacteurs ne semble pas vouloir s'arrêter à Lyon. Avec comme source principale les pentes de la Croix-Rousse où l'on trouve déjà les marques Placid ou Rakwe, les coffee shop Ban ou Arctic. À la limite sud-est desdites pentes, a ouvert un lieu dédié à l'arabica : c'était il y a plus d'un an (en temps Covid, c'est comme si c'était hier) et il se nomme Fika. Il est planqué à deux pas de Sathonay, dans une ruelle qui finit en escalier. Ici, l'on boit diverses préparations à base de café, notamment toutes sortes « d'extractions douces » faites pour ringardiser le percolateur : citons le V60, porte-filtre présentant un angle de 60 degrés, le Chemex dont on plie le filtre soi-même, l'origami fabriqué à la main,  au Japon. On y mange, le midi, une cuisine simple et bien faite par Baptiste Miquet, le fondateur du lieu, qui cuisina au feu-Café Sillon à la Guill' et chez Yohan Comte à Annecy, et qui roulait à la main, ce jour-là, dans la micro-cuisine derrière le comptoir, des gnocchis à la ricotta s'enrobant, cuits,  d'une sauce à l'ail noir.

Baptiste a découvert le café de spécialité alors qu'il bourlinguait en Amérique du Sud. De retour à Lyon, il s'est associé à Corentin Lagrange (ancien du Grand Réfectoire), pour ouvrir Fika. « Au départ on changeait de café toutes les semaines pour faire découvrir de nouvelles choses, différentes origines et manières de torréfier. » Et il y a six mois ils ont changé de cap avec l'aide de Mehdi Benzehda, fondateur de Cafeholic. Corentin nous traîne dans une arrière-salle où sont alignés deux Bullets, de mini-torréfacteurs à induction et port USB, deux petits cochons de métal qui peuvent avaler jusqu'à un kilo de grains verts.

On torréfie ici de manière douce

Méta, c'est le nom de cet atelier de torréfaction, ne se fournit qu'en micro-lots, quelques kilos. « C'est ce qui nous permet d'expérimenter et de nous adapter facilement en fonction du grain, de sa variété, de sa provenance, des conditions de température et d'humidité. » Exemple ? « On a reçu un nouveau Heirloom [une variété endémique d'Éthiopie], on va se baser sur ce qu'on a déjà fait avec des grains similaires et élaborer plusieurs profils de torréfactions [différentes courbes de température notamment]. » Une fois les quelques poignées de grains verts brulés par nos deux cochons, il faut encore une dizaine de jours avant de les goûter (c'est le dégazage) et éventuellement … recommencer. Sans surprise, on torréfie ici de manière douce, c'est-à-dire sans forcer sur le thermostat, pour « laisser s'exprimer les terroirs », éviter une uniformisation par les arômes de caramel et de chocolat qui sont développés par la cuisson. 

Ce qui distingue enfin Méta c'est sa sélection de cafés verts, avec son importateur anglais Falcon Micro. Les cafés de spécialité reçoivent une note sur cent, attribuée par la Specialty Coffee Association of America : au-delà de 85, ils sont considérés comme des grands crus. Chez Méta, tous les cafés sont des 85+ et ils torréfient un grain colombien qui a obtenu la note exceptionnelle de 90. Mais ce n'est pas tout : Méta privilégie aussi des nano-lots qu'ils qualifient « d'expérimentaux » où les producteurs testent de nouvelles manières de macérer et de sécher leur production. C'est le cas d'un rare lot, bientôt épuisé, en provenance des trois hectares exploités par M. Chinguel au Pérou que Corentin faisait déguster encore la semaine dernière : pour ceux et celles qui ne connaissent pas le café de spécialité, c'est l'occasion de se laisser surprendre — et finalement de ne plus voir une capsule en alu de la même manière.

Fika
2 rue Fernand Rey, Lyon 1er

Plat : 10-15€, café filtre 4€, pâtisserie : 3-4€
Méta : de 10 à 58€ le paquet de café (250g)


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