Scott toujours prêt !

Après une fin d'année 2021 qui aura vu éclore deux de ses films sur les (grands) écrans et avant que le prochain, Napoléon, ne voit le jour sur le petit, Ridley Scott fait l'objet six semaines durant d'une rétrospective à l'Institut Lumière. Retour sur une œuvre profuse et spectaculaire, interrogeant volontiers le droit, la géopolitique, l'histoire passée… ou future.


Le hasard a de ces étranges cruautés. Il y a quelques jours, on apprenait la disparition de Vangelis dont les partitions électroniques demeurent indissociables de quelques films marquants des années 1980 et 1990… Et notamment de deux signés par Ridley Scott : Blade Runner (1982) et 1492 : Christophe Colomb (1992). Une petite décennie seulement sépare ces deux films, opposés à bien des égards par le genre (l'anticipation catastrophisto-dickienne d'un côté, l'épopée historique de l'autre) ou la forme (innovation cyberpunk versus néo-classicisme) ; pourtant, elles sont traversées par un même motif apparaissant de film en film comme un leitmotiv scottien — et que le large panorama d'une vingtaine de longs-métrages à l'affiche de l‘Institut Lumière va permettre d'explorer —, celui du récit d'une domination quasi biologique. 

Qui c'est le plus fort ?

Dès son premier long, Les Duellistes (1977), Scott métaphorise l'adaptation darwinienne dans la France post-révolutionnaire avec ses deux bretteurs ferraillant davantage par orgueil que par raison, menant un combat absurde de plusieurs décennies comme indifférent à la boucherie environnante. Il s'agira ensuite de l'affrontement entre des humains et des androïdes (Blade Runner), des aliens (Alien et ses suites-préquelles), d'Européens contre des peuples premiers (1492), des femmes contre des hommes (Thelma et Louise, GI Jane, Le Dernier Duel), des humains contre les éléments (Lame de fond, Seul sur Mars), des libérateurs contre les oppresseurs (Black Hawk Dawn, Mensonges d'État)…

Et l'on pourrait même ajouter sa fameuse publicité pour Apple reprenant l'argument de 1984, dans laquelle un individu s'affranchit de l'uniformité sociale ! Si cette dichotomie semble manichéenne et simplificatrice, elle a le mérite réaliste de ne pas proposer de résolution heureuse systématique : les fins en demi-teinte voyant le trépas des héros (Gladiator, Thelma et Louise) ou l'insolente survie des antagonistes (Alien, Hannibal — qui ne sera pas projeté) fait l'effet d'un memento mori.

Combien précieuse est rétrospective remontrant des films rares ou en director's cut tels que Legend, Kingdom of Heaven, Black Rain ou Traquée ! Méfiez-vous : un mois et demi, ça passe toujours (trop) vite.

Rétrospective Ridley Scott
À l'Institut Lumière du 1er juin au 17 juillet


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