The Rodeo, collection Arlequine


On pourrait prendre Arlequine pour un premier album vu l'enthousiasme inédit avec lequel la presse spécialisée en parle. Ce serait un sacré affront pour l'intéressée, Dorothée Hannequin alias The Rodeo (amateur d'anagrammes levez-vous !) dont le premier EP My First EP est sorti il y a 16 ans — soit deux fois la durée de la carrière des Beatles. On pourrait alors parler d'album de la consécration — ce serait mieux. Sauf que les trois précédents, Music Maelström (2010), La Musica del Diavolo (2015) et Thérianthropie Paradis (2018), ont toujours eu au moins un titre pour taper dans l'œil du public et de la critique.

Disons-le sans détour, on était jusque-là passé à côté de The Rodeo, impair réparé en partie du fait de l'installation lyonnaise de la musicienne. Arlequine est en tout cas le fruit d'une évolution qui l'a vu naviguer à travers les genres, s'attacher à la langue française petit à petit. Étrangement, c'est lorsqu'elle compose et écrit un album sur une rupture vécue comme une libération que Dorothée/The Rodeo semble trouver son style. Qui explore ici une certaine idée d'une pop baroque et/ou rétro — parfois délicieusement vieillotte dans ses références comme dans son expression à cheval sur la geste 60's et la plastique 80's (L'Hymne à la moue) — et évoque aussi bien les espiègleries magnifiques d'un Nino Ferrer ou d'un Neil Hannon (un peu de western, un peu d'easy-listening) que la naïveté affirmée d'une Françoise Hardy — étonnamment, on pense aussi au Blonde Redhead évanescent de Misery is a Butterfly (sur La Coupe est pleine par exemple et du fait d'un jumelage vocal avec Kazu Makino).

Un vrai grand disque de pop à la française (sublimes Vallée de Siddim et Titanic) qui balaie d'un geste la concurrence des miniaturistes branchés et post-modernes par convenance de la génération milléniale.

The Rodeo, Arlequine (Claro Obscuro / Modulor)
Au Sonic le jeudi 20 avril


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