Les livres de couleurs

D'apparence bordélique, la nouvelle expo du musée de l'Imprimerie est emplie de pistes pour creuser des œuvres. Parmi les milliers de déclinaisons possibles pour exposer les couleurs via le livre, objet-clé du parcours, voici une proposition conçue comme un message personnel au public qui véhicule aussi une certaine conception du rapport à l'art : désacralisé.


Ne pas s'attendre à une vision globale de ce que sont les couleurs vert-rouge-bleu qui, additionnées, donnent la lumière blanche. Il y a bien un panneau introductif à chacune d'elle, rappelant notamment que le rouge fut la première des couleurs à apparaitre dans le langage puisque coloratus en latin signifie "rouge" ou "couleur" selon le contexte où il est employé, mais ce n'est pas une petite encyclopédie que propose le musée de l'Imprimerie.

Il y a un plaisir évident du commissaire et directeur du lieu Joseph Belletante à jongler avec les médium : estampes, imprimés, photos, vidéo… et à ne pas les hiérarchiser. Ainsi dans le vert–Véronèse, véritable teinte, des reproductions des tableaux du peintre italien affichent leur piètre qualité — se rapprocher de l'original n'est pas ici un enjeu, ce qui intéresse est de les confronter à ce qui fait œuvre aujourd'hui pour la jeune génération comme ces extraits du jeu japonais Zelda aux personnages tout verts et à l'exposition de planches Zelda, le jardin et le monde d'Alex Chauvel (2022). Comme ceux de Stephen King, figure du rouge, et de Bluets (2009) de Maggie Nelson, figure du bleu, les livres sont au cœur du parcours, totems intemporels.

Le dollar et Babar

Le rouge de King permet de raconter une histoire (à lire au gré des différents cartels), celle d'un écrivain inspiré par les comics d'horreur et fantastiques des années 1940 et 1950 (visibles ici) et dont le travail a inspiré de grands réalisateurs comme Cronenberg pour Deadzone (que King adouba) ou Kubrick pour Shining (que King détesta). À chaque fois, des extraits de livres, les affiches et des extraits vidéo sont présentés.

Ces trois figures désignées pour RVB ne règnent pas en maîtres au-dessus de ces notions. S'agrègent aussi autour du vert le dollar et Babar et autour du rouge, une évocation des roses, le mythique logo Lego®, des affiches du constructivisme russe ou encore une œuvre récente de lithographie, Se coiffer (2016) de Françoise Pétrovitch, nouvelle acquisition d'un musée en permanente mutation. 

RVB
Au musée de l'Imprimerie et de la communication graphique jusqu'au dimanche 3 septembre


<< article précédent
Rencontre avec Georges Didi-Huberman à la Fondation Bullukian