Les graines de La Germination

Chaussez des casques de réalité augmentée et envisagez le futur pour soi, pour les autres espèces ou en tentant de cohabiter au mieux avec les vagues de migrations humaines. C'est avec un triple scénario que Joris Mathieu et Nicolas Boudier invitent à réfléchir dans la nouvelle création du TNG, "La Germination".


Penser le monde de demain. Voilà à quoi s'attèle Joris Mathieu depuis qu'il a pris, en 2015, la direction du TNG et introduit notamment le temps fort Nos Futurs. La Germination ne s'inscrit pas dans ce cadre-là, mais dans la politique globale qu'il mène dans ce théâtre, temporairement privé de sa grande salle à Vaise, en rénovation pour encore une saison. Et de politique, il est nécessairement question avec ce metteur en scène très préoccupé par « la culture de la peur » qu'édicte Laurent Wauquiez en Auvergne-Rhône-Alpes ; il le dit dans une tribune très explicite et charpentée publiée sur le site du Syndeac le 18 avril dernier.

Y a-t-il un rapport avec sa création ? Non car il ne signe pas là une défense de ses intérêts propres — le TNG est un CDN financé en premier lieu par l'État. Oui car ses mots témoignent d'une conscience accrue que ce qui se joue dans le financement de la culture et le désengagement soudain et inexpliqué de certains partenaires publics est à hauteur des enjeux de transmission qui se nouent dans un théâtre et tout particulièrement dans La Germination. Ce n'est pas par le texte même que ce travail s'impose — souvent, voire trop, pédagogique — mais par l'ambition d'inventer un univers poétique et sensible autour d'une question : quel monde voulons-nous pour demain ?

Scène tangible

Concrètement, 80 spectateurs se munissent de lunettes de réalité augmentée (et non virtuelle) et vont rencontrer trois personnages qui incarnent les options du transhumanisme (tout mettre en œuvre pour la survie de l'humain au détriment du reste), de l'antispécisme (privilégier le vivant autre que l'humain) et le cosmopolitisme (partager les ressources face au retour du nomadisme engendré par le réchauffement climatique notamment).

Tout existe au plateau : des acteurs, un décor de serre-bunker, des éléments de décors évolutif (un arbre qui perd ses feuilles, des plantes qui poussent dans des pneus…). Le spectacle, dont nous n'avons pu voir qu'une phase de test, allie de façon très habile ces discours aussi ancestraux que fondamentaux avec cette technologie de transparence qui laisse apparaître (dans les lunettes) des images projetées d'une horloge qui tient le décompte de la fin du monde ou d'animaux reprenant leur place. Les réponses (faites par un geste de la main) aux questions qui nous sont adressées, ne sont pas prises en compte. CQFD !

La Germination
Au TNG du mardi 2 au mercredi 10 mai


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