De main en main

Dans les salles fascinantes du Fort de Vaise, la Fondation Renaud propose La fabrique du regard. Les filiations lyonnaises de Gustave Moreau retraçant les parcours de cinq artistes lyonnais dans le sillage d'une tension entre transmission et singularité.


S'il fallait résumer l'exposition par une image, il serait approprié d'évoquer celle d'un geste pictural : un pinceau, passant de la main du maître à celle de l'élève, traçant une interminable ligne de couleur, composite, irrégulière, mais commune. Initié par le grand symboliste, ce signe traverserait un siècle et demi d'histoire artistique, se colorant au fil du temps d'intenses teintes lyonnaises.

Transmission et individualité

En prologue à l'itinéraire qui prend vie dans le cœur du Fort de Vaise, apparaît la figure de Gustave Moreau, à l'origine d'une école artistique particulière, privée de ses œuvres et axée sur l'émergence des singularités : parmi elles, Matisse, Rouault, mais aussi le Lyonnais Georges Décôte. Ce dernier retrouvera sa ville natale en 1896 afin de se consacrer à la maitrise d'œuvres des grandes verrières de Notre-Dame-de-Fourvière, incarnant parfaitement les principes du Maître de la belle inertie et de la richesse nécessaire. Décôte fut à son tour professeur de Louis Charrat, artiste discret dont il est possible d'apprécier la fascinante Vue du pont Saint-Georges où la superposition des différentes techniques, aquarelle et encre, crée une profondeur saisissante. Si la figure de son élève Claude Grand est évoquée par les témoignages picturaux et la parole de ses élèves, celle de Fabienne Comte (co-commissaire de l'exposition avec Stéphanie Rojas-Perrin et Patrice Charavel) conquiert par la puissance de l'expression et l'explosion de la couleur. Se positionnant à la fin de cette trajectoire de transmission, l'artiste évoque l'initiateur de cette « non-école » avec son Apparition de saint Jean-Baptiste à Salomé qui rappelle, en l'actualisant, le chef-d'œuvre de Moreau.

La fabrique du regard. Les filiations lyonnaises de Gustave Moreau
à la Fondation Renaud jusqu'au 11 février


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