Raconter le drame avec poésie : Edith Roux et la diaspora ouïghoure

Le Bleu du Ciel accueille Les Exilés, projet poétique et raffiné d'Edith Roux, qui documente la vie quotidienne de celles et ceux qui ne peuvent plus retrouver leur terre.


« Dans mon propre pays, il n'y a pas de place pour mon corps / Dans les autres pays, il n'y a pas d'espace pour mon âme ». Ces mots, au dos d'un papier reproduisant le motif d'un tissu traditionnel ouïghour, évoquent avec précision le sentiment d'un peuple menacé et persécuté. Après un voyage en Chine en 2010 ayant donné lieu au travail précurseur Les Dépossédés, témoignage des bouleversements politiques, sociaux et humaines en cours dans la région du Turkestan oriental, Edith Roux continue de faire résonner les souffrances d'une communauté en péril, à travers un travail touchant et lumineux.

Dans les salles du centre photographique des Pentes, les corps des exilés trouvent enfin un peu de répit, afin de pouvoir raconter leur histoire, leur drame. Des femmes, des enfants et des hommes révèlent, sans l'exhiber, une résistance à la condamnation, une volonté de regarder de l'avant malgré le supplice les traquant même à l'étranger. Cette résistance, décrite avec finesse par le magnifique texte de Corine Pelluchon accompagnant l'exposition, s'incarne ainsi dans les poésies calligraphiées, dans la danse des vêtements d'enfants de la vidéo Les innocent.e.s, et dans le fondement de l'éthique lévinassienne, ce visage qui, même dissimulé, ne pourra jamais être anéanti.

Edith Roux. Les exilés
au Bleu du Ciel jusqu'au 2 mars


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