Nicolas Galaud : « Aux bibliothèques de Lyon, on n'a jamais prêté autant de livres qu'en 2023 »

Nicolas Galaud est directeur des bibliothèques municipales de Lyon depuis 2020. Alors que l'année 2024 est bien entamée, Le Petit Bulletin fait un bilan sur le premier équipement culturel de la Ville de Lyon.

 


Quels étaient les enjeux de la bibliothèque municipale lors de votre prise de poste ? Quels sont-ils aujourd'hui ?

Nicolas Galaud : L'après Covid a été difficile. En 2019 on comptait 2 millions et demi de visiteurs par an, c'est-à-dire 20 % de la population lyonnaise. En 2021, on a réalisé avoir perdu 50 % de visiteurs. Nous accueillons des publics fragiles, qui ont mis du temps à se faire vacciner. Cela a entraîné une perte d'habitude, presque une rupture pour certains.

Depuis 2021 on remonte petit à petit la pente. D'après le bilan de l'année 2023, on est repassés au-dessus de la barre des deux millions de visiteurs, mais on constate toujours un recul de 22 %.

Les pratiques et habitudes des publics des bibliothèques ont-elles changé ?

Les supports audiovisuels sont moins empruntés, notamment les CD et DVD, il en va de même pour la presse en physique. En revanche, on n'a jamais prêté autant de livres qu'en 2023. C'est important de le dire, on a souvent entendu que c'était la fin du livre, mais après 1500 ans d'existence, les personnes veulent toujours lire, et sur du papier.

On a aussi développé du prêt d'objets. Il peut s'agir d'instruments de musique, mais aussi de lecteurs DVD depuis cette année. Tous rencontrent beaucoup de succès.

Le profil des abonnés des bibliothèques a-t-il évolué ?

On remarque une nette baisse des enfants de moins de douze ans, alors que ces derniers sont d'habitude surreprésentés parmi nos emprunteurs et emprunteuses. Entre 2019 et 2021, on a perdu 6 % de la population scolaire. Cela s'explique notamment par une baisse de la natalité. En attendant que le Président de la République « réarme démographiquement » Lyon, nous avons donc offert aux parents la possibilité de coupler l'inscription à l'école avec une inscription gratuite en bibliothèque. On constate aussi une augmentation des seniors, des plus de 75 ans. Là aussi, liée aux évolutions démographiques de la ville.

Il y a surtout une baisse des visiteurs depuis 2019. Les abonnés empruntent toujours autant mais espacent plus leurs venues. Les bibliothèques de quartier sont toujours très fréquentées, mais beaucoup moins les grosses bibliothèques, comme le bâtiment de Vaise, de Bachut et surtout la bibliothèque de la Part-Dieu.

La vétusté de cette dernière est une piste de réflexion, d'ailleurs d'ici à 2025 on désignera l'architecte en charge de la rénovation de la bibliothèque Part-Dieu. De plus, les travaux ne rendent pas le quartier très accueillant.

Qu'en est-il des profils des personnes qui fréquentent les bibliothèques, sans forcément emprunter ?

Les publics dits « séjourneurs » sont en baisse. Ce sont pourtant ceux qui viennent chercher la dimension sociale de la bibliothèque, qui s'y rendent pour avoir accès à des services. Parmi eux des étudiants, mais aussi des publics fragiles qui viennent réaliser des démarches administratives sur nos ordinateurs : rédiger un CV, chercher un emploi. D'ailleurs, nous proposons de nombreux accompagnements comme des permanences d'écrivains publics pour les aider à faire ces démarches.

On peut aussi citer les publics de l'action culturelle (conférences, expositions, lectures) qui viennent aussi moins. On organise bon nombre d'événements pour tenter de les reconquérir, on en voit peu à peu les effets.


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