Des bienfaits de la mélancolie

1966-79

Institut d'Art Contemporain

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Sous la houlette de Laurent Montaron, l’exposition "1966-79" réunit des artistes nés dans cette période-titre, se réappropriant l’héritage des années 1960-70, interrogeant le présent à la lumière du passé, sans nostalgie mais non sans quelque mélancolie. Jean-Emmanuel Denave

Les mises en abyme artistiques ont pour nous quelque chose d’insupportable. L’art sur l’art ou le discours sur le discours devraient se cantonner à l’étape du brouillon et de la réflexion préparatoire, et déboucher sur autre chose qu’un objet nombriliste.

L’Opéra de Lyon présentait récemment Capriccio de Richard Strauss, sommet d’ennui où l’opéra s’interroge sur l’opéra, et où les protagonistes s’enferment dans un débat sans fin sur la suprématie de la poésie ou de la musique. Comme disait Roland Barthes, il est toujours plus difficile d’inventer une solution que de choisir entre deux solutions possibles…

Nombre d’artistes sélectionnés par Laurent Montaron à l’Institut d’Art Contemporain semblent issus de cette veine narcissico-assommante, tel le photographe Dove Allouche, qui se replonge dans les fondamentaux de l’image. Mais ici, l’ennui est étrangement battu en brèche par une réappropriation, souvent poignante, de procédés et techniques anciens : l’autochrome ou le daguerréotype chez Allouche, la pellicule 16 mm chez d’autres, le tissage chez l’Allemande Ulla Von Brandenburg, la céramique chez Guillaume Leblon.

L’ombre de l’objet

Le narcissisme s’ouvre dans cette exposition à la mélancolie, et cette infime différence change la donne. Le Suédois Alexander Gutke signe l’une des œuvres paradoxalement (selon nos critères habituels) les plus émouvantes. Soundtrack est un film sur… l’appareil même qui le projette, un projecteur 16 mm dont l’artiste nous montre, en plans lents et serrés, les rouages, les lampes, les entrailles. Sa dimension sonore intensifie encore la poésie mélancolique de l’œuvre : certes l’art n’a plus ici d’autre objet que son propre médium mais, au-delà, l’objet de l’art semble à la fois indéterminable et définitivement perdu. Soit à peu près la définition de la mélancolie chez Freud.

La mélancolie, on le sait aussi (rappelons la grande exposition sur ce sujet organisée par Jean Clair), vide l’artiste autant qu'elle le nourrit. Et si certains pointent les «bienfaits de la dépression» ou pensent que «la dépression permet d’éviter de rester con toute sa vie», on aura tendance à conclure que la bile noire de la mélancolie n’est pas un mauvais breuvage artistique, même en 2013.

1966-79
A l’Institut d’Art Contemporain de Villeurbanne, jusqu’au dimanche 11 août

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