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Rouault, un électron libre

Georges Rouault

Musée d'Art religieux de Fourvière

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Le Musée de Fourvière présente une centaine d'oeuvres de Georges Rouault. Un peintre qui, les pieds et les mains dans le cambouis, arrachent des toiles une rare et émouvante puissance. Jean-Emmanuel Denave

Le 27 mai 1871, les Versaillais bombardent sans vergogne les Communards. Dans une cave parisienne, le petit Georges Rouault pousse ses tout premiers vagissements. L'entrée en scène du peintre est aussi une entrée en matière : sous terre et dans le bruit et la fureur d'une guerre civile. On peut y percevoir en pointillés les coordonnées artistiques d'un homme, fervent catholique, qui toujours fera des allers et retours entre le bas et le haut, la matière et l'esprit, le matériau pictural le plus lourd et la forme la plus touchante. «Quand ça sent la merde, ça sent l'être» dira plus tard, dans la même veine, Antonin Artaud.

 

En attendant, Rouault se forme au sein du célèbre atelier de Gustave Moreau, admire Cézanne, est fasciné par Goya et commence par peindre artisanalement sur verre. Il est le contemporain de Matisse et de Picasso, mais en regardant sa peinture, on a l'impression qu'il n'a eu cure des avant-gardes et de leurs "ismes" : cubisme, surréalisme, futurisme... Rouault, ce sont des clowns, des femmes nues, des acrobates, des pauvres, des Christ qui vous sautent à la figure et vous plantent dans les yeux, frontalement, la densité de leurs traits épais, la boue sanglante et compacte de leurs huiles, leur force tellurique.

 

«Toujours la même salope»

 

Participant en 1907 au Salon des Indépendants aux côtés des Fauves, il y glane à la fois la risée du public et une satanée critique de la part de son ami Léon Bloy (ils le resteront ensuite tout en évitant d'échanger sur l'art !). Le fameux polémiste et écrivain mystique écrivit : «J'ai vu naturellement votre unique et sempiternelle toile, toujours la même salope ou le même pitre, avec cette seule et lamentable différence que le déchet, chaque fois, paraît plus grand... J'ai aujourd'hui deux paroles pour vous, après quoi vous ne serez plus pour moi qu'une viande amie. Primo : vous êtes attiré par le laid exclusivement, vous avez le vertige de la hideur. Secundo : si vous êtiez un homme de prière, un eucharistique, un obéissant, vous ne pourriez pas peindre ces horribles toiles. Un Rouault capable de profondeur sentirait un peu d'épouvante».

 

A la fois libre et aveugle à l'air du temps, Rouault peint donc, envers et contre tout, toujours le même tableau mais en variant ses matériaux (huile, aquarelle, gravure, gouache...) et en cherchant sans cesse à le dépouiller de toute hypocrisie sociale ou stylistique. Avec des moyens modestes, le Musée de Fourvière tente de retracer, en une centaine d'œuvres, le parcours de cet écorché vif qui n'a pas peint que des chefs-d'œuvre. Mais alors quels chefs-d'œuvre !

 

 

Georges Rouault
Au Musée d'Art Religieux de Fourvière, jusqu'au dimanche 5 janvier

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