La photographe féministe Shadi Ghadirian à l'honneur de la BM de la Part-Dieu

Shadi Ghadirian

Bibliothèque de la Part-Dieu

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

La Bibliothèque de la Part-Dieu présente la première rétrospective française consacrée à la photographe iranienne Shadi Ghadirian. Des images sur la condition féminine et le monde d'aujourd'hui qui interpellent avec cocasserie et efficacité notre regard. Jean-Emmanuel Denave

Œuvres frontales, esthétiques et souvent minimalistes, on croirait les photographies de Shadi Ghadirian inspirées par une certaine histoire de la peinture. Or, ce sont les premières photographies de studio du XIXe siècle et plus globalement la photographie historique qui fascinent l'artiste iranienne (née à Téhéran en 1974) et inspirent ses mises en scène, particulièrement efficaces.

Sa toute première série, Qajar, reprend même les tons sépias, les décors et les vêtements des portraits de studio de la dynastie éponyme, qui a régné en Iran de 1785 à 1925. Shadi Ghadirian y ajoute des objets contemporains anachroniques : une canette de soda, un téléphone, un VTT, un aspirateur... «Dans mon imaginaire, cette géographie temporelle est sens dessus dessous. Pour moi, une femme, une femme iranienne, une femme comme moi, est à la croisée de toutes ces frontières inconnues qui séparent la tradition de la modernité» écrit l'artiste.

En quelques mots, elle résume aussi ce qui fera l'une des dimensions essentielles de ses séries suivantes : cette capacité à nouer ensemble l'autobiographie, le statut des hommes et des femmes en Iran, celui des hommes et des femmes en général. Nil, nil, série réalisée en 2008, montre par exemple des objets de guerre (masque à gaz, balle, grenade...) ramenés par des anciens combattant du front de la guerre Iran-Irak et insérés parmi d'autres objets de la vie quotidienne. Ces "natures mortes" parlent tout à la fois de la guerre en général, d'une guerre en particulier et de «la peur et de l'angoisse au quotidien» qu'a vécues l'artiste à cette époque.

Ménagères professionnelles

Très vite, les images de Shadi Ghadirian ont connu un grand succès international. À Téhéran, l'artiste expose dans une galerie sans trop avoir à pâtir de la censure. Mais l'une de ses séries les plus fortes, Like Everyday, a été aussi la plus violemment critiquée par le public – les hommes et les femmes d'âge mûr en particulier.

En 2000, alors qu'elle vient de se marier, l'artiste découvre la routine de la ménagère au foyer, sa contradiction d'avec la vie amoureuse. «Dans Like Everyday écrit-elle, je remplace le visage des femmes par les objets domestiques quotidiens qui déterminent la vie des "ménagères professionnelles". La femme est obligée de se plier aux souhaits et aux désirs des "autres" si bien qu'elle n'a pas de visage en propre à afficher. Il suffit de soulever le rideau pour l'apercevoir derrière l'étoffe qui habille la fenêtre. Qui est-elle ? Elle est moi. Une femme.»

La guerre, la vie de couple, mais aussi les nouvelles technologies, la censure vestimentaire, l'oppression sociale sont quelques-unes de thématiques abordées avec intelligence et subtilité par Shadi Ghadirian.

Shadi Ghadirian
À la Bibliothèque Municipale de la Part-Dieu jusqu'au 9 janvier

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