«À Nevada City, le temps passe moins vite»

Alela Diane, auteur de "The Pirate’s Gospel", révélation folk de ces derniers mois. Propos recueillis pas Stéphane Duchêne

Petit Bulletin : Alela Diane, Mariee Sioux, Joanna Newsom, mais aussi Lindsay Clark, Alina Hardin… Pourquoi Nevada City accouche-t-elle d’autant de folkeuses ?
Alela Diane :
Je ne sais pas, c’est assez dingue ! Nevada City est une petite ville, les habitants y sont très tournés vers les arts et nous nageons tous beaucoup dans la rivière, je n’ai pas d’autre explication à ça. Ce qui est encore plus drôle c’est que ces filles sont toutes mes amies ; elles correspondent chacune à une période de ma vie. Je connais Mariee depuis toute petite car nos parents jouaient dans les mêmes groupes. Lindsay Clark était ma voisine d’enfance. Nous allions à la chorale ensemble, attendions le bus dans la neige et à 13 ans nous avons écrit toutes les deux une horrible chanson. Quant à Alina c’est la petite sœur d’une de mes meilleures amies, avec qui j’ai habité à San Francisco.

Vous avez toutes en commun de jouer une musique très enracinée, comme si à Nevada City, le temps s’était arrêté. C’est le cas ?
Il ne s’est pas arrêté, non. Mais peut-être qu’il passe moins vite qu’ailleurs. Nevada City est un très bel endroit, très inspirant. Mais il n’y a pas grand-chose à y faire alors les enfants dessinent ou construisent des cabanes en bois. Et quand ils sont plus vieux, ils écrivent des chansons.

Pete Seeger a dit un jour “une nouvelle chanson n’est pas une chanson folk”. Il disait aussi vouloir remonter le temps, grâce à sa musique, jusqu’à l’époque où les gens vivaient dans de petits villages et s’occupaient les uns des autres. C’est assez raccord avec votre approche musicale…
Nevada City est un village où les gens prennent soin de leur prochain. Les gens se préoccupent de comment vous allez, de comment vont vos parents. Cette attitude communautaire et l’environnement naturel qui l’entoure sont le terreau de toute expression créative à travers l’art et la musique.

Quelle est votre définition de la musique folk ?
Pour moi le folk raconte l’histoire d’une époque ou d’un endroit. C’est une musique honnête et authentique qui permet de voyager.

On vous compare souvent à de vieilles chanteuses folk telles que Karen Dalton ou Buffy Sainte-Marie. Vous sentez-vous proche de leur musique ?
J’ai découvert Karen Dalton il y a deux ans. Sa voix renferme beaucoup de noirceur et de mystère et j’ai beaucoup de respect pour sa musique. Mais pour être honnête, je n’avais jamais entendu parler d’elle quand j’ai enregistré The Pirate’s gospel. Je connais peu Buffy Sainte Marie. Mon amie Mariee Sioux et moi l’avons regardé une fois sur Youtube et nous étions émerveillées. Il faut absolument que je me procure un de ses disques.

Mariee Sioux semble influencée par la musique indienne ? Est-ce votre cas ?
Elle n’est pas tant influencée par la musique indienne que par la culture indienne, ou plutôt sa négation. Elle est profondément blessée par le fait qu’un peuple et un mode de vie aient pu être détruits par la fondation de notre pays, que nos maisons se soient bâties sur du sang. Je pense souvent à cette page sombre de l’histoire mais la musique de Mariee en rend mieux compte que la mienne. Elle a du sang indien.

Vous avez commencé la musique tard, à 20 ans, et enregistré The Pirate’s Gospel dans la foulée… Que faisiez-vous avant ?
J’allais à l’école, je chantais dans une chorale. Je faisais aussi pas mal d’arts plastiques. Ma mère est peintre et quand j’étais enfant j’ai suivi ses traces. J’ai fait beaucoup de dessins, de portraits, fait de la photo. Mes premiers pas dans la création avant les chansons.

Qu’est-ce que le «gospel du pirate» ?
J’ai écrit la chanson qui donne son titre à l’album après avoir campé dans les bois des environs de Nevada City avec des amis. Nous devions traverser un lac en canoë pour atteindre le campement. En ramant nous chantions du gospel pour nous donner du courage. Nous avons continué pendant une bonne partie du week-end. Le titre est venu de là.

Quels musiciens écoutez-vous en ce moment ?
Je suis en tournée avec Mariee et je l’écoute chanter chaque soir. En dehors de ça, dans le bus, nous écoutons Neil Young et Kate Wolf.

Avez-vous une idée de ce que sera votre prochain disque ? Sera-t-il très différent du précédent ?
En réalité, il est déjà enregistré. J’ai travaillé dessus toute l’année dernière et il est assez différent de The Pirate’s Gospel, plus abouti. Pas question de faire deux fois le même disque, je vais de l’avant.

pour aller plus loin

vous serez sans doute intéressé par...

Mardi 24 avril 2018 En plus d'Alela Diane, le Petit Bulletin Festival #2, ce sont deux autres têtes d'affiche, Cascadeur et Orchestra Baobab, et quatre jeunes talents fascinants. À noter aussi quelques concerts acoustiques et surprises à découvrir sur place pour...
Mercredi 28 mars 2018 Après son Petit Bulletin Live de 2014, la reine du folk indé Alela Diane revient nous rendre visite avec son dernier album "Cusp", poignant témoignage personnel, comme elle sait si bien les livrer, sur l'expérience de la maternité.
Mercredi 28 février 2018 De Cascadeur à Orchestra Baobab en passant par Sage, Alela Diane et tous les autres, petite sélection best of spéciale Petit Bulletin Festival #2. Même si le meilleur est à venir en live du 27 au 29 avril au Subsistances.
Mercredi 7 février 2018 Pour sa deuxième édition, le Petit Bulletin Festival prendra ses quartiers aux Subsistances les 27, 28 et 29 avril prochains avec pas moins de sept artistes au programme, de la folk à la pop en passant par la world music. En voici le détail.
Dimanche 8 mars 2015 C'était le 12 juin 2014. Sous une chaleur accablante, Alela Diane faisait littéralement suffoquer la Salle Rameau lors du dernier PB Live de la saison (...)
Jeudi 5 juin 2014 En visite lyonnaise pour un PB Live intime, Alela Diane interprètera, entre autres et en solo, les sublimes chansons d'"About Farewell". De cet album contant les prémices de son divorce, la folkeuse de Nevada City a fait un disque de renaissance...
Vendredi 6 juillet 2012 Quand il s'agit d'évoquer ce que l'on a commencé à appeler le néo-folk, au mitan des années 2000, le nom d'Alela Diane s'impose immédiatement. (...)
Jeudi 5 avril 2012 On avait découvert Mariee Sioux Sobonya alias Mariee Sioux, par la grâce – à tous les sens du terme – de son amie d'enfance Alela Diane, qu'elle (...)
Lundi 26 mars 2012 Et voici la programmation complète (ou presque, tant elle est riche) des Nuits de Fourvière 2012 ! Certains événements étaient déjà connus, mais s’y ajoutent d’excellentes surprises, qu’elles soient musicales ou théâtrales… Christophe Chabert
Vendredi 30 septembre 2011 Pop / C'est donc maintenant Alela Diane «& Wild Divine». Du nom du groupe qui l'accompagne, bien sûr. Tout est dans le «&», comme une tentative de (...)
Jeudi 15 septembre 2011 Fini les tresses d'indiennes, les pochettes sépias et les robes cousues mains par mémé dans une caravane de Nevada City, qui donnaient à la chanteuse et à son (...)
Mercredi 13 mai 2009 Musique / Révélée en folkeuse de Nevada City l’an dernier avec The Pirate’s gospel, Alela Diane sort de sa solitude et s’affranchit de ses racines musicales sur un nouvel album très réussi, To be still. Christophe Chabert
Mardi 8 avril 2008 Si on dénonce souvent le copinage et le favoritisme, il faut parfois reconnaître que de temps à autre il peut avoir du bon. Car en plus de venir présenter son (...)
Mardi 8 avril 2008 De passage à l'Épicerie Moderne, Alela Diane et sa copine Mariee Sioux sont le fruit d'une longue tradition de folk conjugué au féminin. Panorama non-exhaustif des grandes dames qui ont semé le folk aux quatre vents. Stéphane Duchêne

Suivez la guide !

Clubbing, expos, cinéma, humour, théâtre, danse, littérature, fripes, famille… abonne toi pour recevoir une fois par semaine les conseils sorties de la rédac’ !

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X