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L'oeil et l'oreille
Par Dorotée Aznar
Publié Lundi 1 mars 2010 - 4105 lectures
Musique / La création musicale contemporaine a rendez-vous à Lyon. Du 1er au 21 mars, la Biennale Musiques en scène invite 33 compositeurs du monde entier. Ils viennent redire, s’il le fallait, que la création est multiple, mouvante et qu’elle se réinvente sans cesse. Pascale Clavel
L’univers de Kaija Saariaho est fait d’une multiplicité d’éléments et les rencontres entre instruments réels et sons électroniques jalonnent ses pièces. «J’utilise l’électronique quand j’ai le sentiment d’en avoir besoin. Ma manière de m’en servir est très reconnaissable. C’est une façon de réorchestrer, un prolongement de l’instrument. J’aime lisser les frontières entre les deux univers», explique-t-elle. Lorsqu’on lui demande s’il existe une hiérarchie dans son œuvre, elle répond : «toutes les compositions sont très importantes, mon premier quatuor Nymphea a plus de vingt ans, il est dans le répertoire de plusieurs Quatuors et sera joué ici par un tout jeune quatuor, le quatuor Tercea. J’aime le travail avec les étudiants et, pour cette Biennale, les élèves du CNSMD vont jouer aussi mes pièces». Chacune de ses œuvres serait nécessaire, de son grand concerto pour violoncelle à des œuvres plus intimes pour voix ou quatuor et électronique. Pour Kaija Saariaho, les concerts qui se passent dans les petites salles ne sont pas moins importants que les autres. Très souvent, le contact avec la musique ne dépend pas de la taille de la salle mais de ce qui s’y passe. «Le plus important reste la communication entre les musiciens et les gens qui les écoutent».Des érudites
L’Émilie du nouvel opéra de Kaija Saariaho, c’est Émilie du Châtelet. Érudite française du XVIIIe siècle, devenue l’une des plus grandes scientifiques de son époque, elle a par exemple entrepris la traduction du latin en français des Principia Mathematica de Newton. Esprit extrêmement libre, amante de Voltaire, elle écrit en plein XVIIIe siècle : «Pourquoi devons-nous servir notre Dieu et le faire à travers nos souffrances ? Pourquoi ne pas le servir à travers nos plaisirs ?». Mais qui connaît Émilie du Châtelet au XXIe siècle ? C’est après la lecture d’Émile, Émilie d’Elisabeth Badinter, que Kaija Saariaho a eu l’idée de cet opéra. «Il y a énormément de femmes comme Émilie dans l’histoire… Depuis le début de notre culture occidentale, les femmes qui ont eu la possibilité de s’exprimer sur le plan artistique étaient dans des monastères. Leur musique n’a donc pas beaucoup circulé. Mais ce phénomène est plus général, l’histoire a été écrite par des hommes». Des femmes à découvrir lors de cette édition de la Biennale.Émilie
À l’Opéra de Lyon, jusqu’au samedi 13 mars.
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