Visions de l'Amen break

Venetian Snares + Room 204

Marché Gare

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Venetian Snares adore les chats – son premier album, paru il y a plus de vingt ans, s'intitulait "Songs About My Cat". Mais ce qu'il aime par-dessus tout, c'est faire la guerre aux conventions rythmiques à coups de breaks imprévisibles et de violons dramatiques. Petit rappel de ses faits d'armes, avant son intervention au Marché Gare. Benjamin Mialot

Avant le «snare un peu Berlin» des frimeurs peroxydés de La Femme, il y eut le "snare un peu Venise" du blondin effacé Aaron Funk. Un son de caisse claire encapsulant la ville aux mille masques dans ce qu'elle a de plus labyrinthique et de plus tragique, mis au point à Winnipeg au début des années 90 sous le nom, on vous le donne en mille, de Venetian Snares, et rapidement devenu métonymique du breakcore.

Note à l'attention des lecteurs qui ne sont pas détenteurs d'un doctorat en typologie des sous-cultures électroniques : le breakcore est une musique d'apparence barbare mais intrinsèquement savante qui emprunte à la techno son implacabilité, à l'indus ses ambiances fin de règne et au jazz ses rythmiques-chausse-trappes – comme par hasard, l'une des traductions de snare est "piège". Et Aaron Funk est au genre ce que le Britannique Richard D. James, nom de code Aphex Twin, est à la dance music dite intelligente.

Pièges en eaux troubles

Goût des titres indéchiffrables sans une pierre de Rosette, prolificité à l'occasion contre-productive (en 2001, Funk a publié pas moins de huit disques), pilosité de viking : bien que séparés par un océan et mus par des intentions diamétralement opposées – Funk annihile la pulsion de danse, James la civilise – les deux producteurs ne manquent pas de points communs. Le plus notable étant donc celui d'avoir su élever de "simples" techniques, le drumwork pour l'un, le sound design pour l'autre, au rang d'arts identifiables dès la première mesure, fut-elle asymétrique ou régulière.

Comment ? Dans le cas du trappeur vénitien, en consacrant autant d'énergie aux obligatoires tailles/fractures/remodelages de la pierre angulaire du breakcore – l'Amen break, un solo de batterie enregistré par le sextet soul The Winstons en 1969 et depuis samplé par l'équivalent de la population de la Sérénissime en haute saison, de NWA à Oasis en passant par Nine Inch Nails et les bourrins masqués de Slipknot – qu'au tissage d'arrangements de cordes baroques.

D'où une musique d'une majesté qui n'a d'égale que la violence dont elle est le contrepoint, tel l'envol de colombes (voir la pochette de Rossz csillag alatt született, le chef-d’œuvre indiscutable du bonhomme) qui précède un déluge de bastos dans les films de John Woo. Le titre de son vingt-deuxième (!) album, qui met fin à un passage à vide créatif de près d'une décennie, résume à lui seul cette démarche qui, notamment dans son approche du collage comme défi tour à tour poétique (My Downfall, fausse BO et vraie mise en sons d'une dépression) et régressif (l'explicite et totalement raté Cubist Reggae) lancé à l'académisme, n'est pas sans rappeler celle des surréalistes. Il s'appelle My Love Is a Bulldozer, et de vos préconceptions du bruit et de la grâce il fera table rase.

Venetian Snares [+ Room 204]
Au Marché Gare mercredi 5 novembre

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