So Long, Slow Joe

ANNULé // Slow Joe & The Ginger accident

La Boîte à gants

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Rock / C'est un communiqué de son ami, découvreur, mentor et guitariste Cédric De la Chapelle qui a annoncé la nouvelle. Slow Joe, chanteur de Slow Joe & the Ginger Accident, s'en est allé dans la nuit de dimanche à lundi. À Lyon depuis une dizaine d'années pour y vivre une carrière aussi tardive que spectaculaire, Joseph Manuel Rocha, avait passé plus de 60 ans dans son Inde natale. Il était pourtant sans doute l'un de nos rockers les plus lyonnais. Une figure familière et singulière, sympathique autant qu'énigmatique qui manquera beaucoup à ceux qui l'ont croisé, vu et surtout écouté chanter.

Il y a un vrai-faux dicton qui dit que, pour un Lyonnais, « est lyonnais toute personne ayant posé au moins une fois le pied sur le quai de le gare de Perrache. » Ceci valant particulièrement quand on est une personne célèbre, un artiste ou quelqu'un qui a réussi. Joseph Manuel Rocha était les trois. Et il était Lyonnais bien qu'ayant passé plus de 60 années en Inde à vivre mille vies, pas toujours rose. Il était Lyonnais, car il a vécu la dernière de ses mille vies à Lyon — dans les environs de la place Sathonay où il décédé dans la nuit de dimanche à lundi.

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Cette vie là a commencé quand le musicien Cédric de La Chapelle a repéré ce vieil homme à la voix de crooner sur une plage de Goa et décidé de l'emmener dans ses bagages, donnant par là-même naissance à Slow Joe (le surnom de Joseph) & the Ginger Accident. Une carrière débutée à 64 ans, des tas de concerts, un buzz médiatique important porté par cette belle histoire et le résultat musical de cette rencontre accidentelle qui accouchera aussi de deux albums, Sunny Side Up et Lost for love (le troisième était, selon Cédric De la Chapelle, en cours de finalisation et sera posthume).

Naturellement, comme on change de rue (quelques péripéties en plus), Joe est venu s'installer à Lyon pour de bon avec ses nouveaux camarades et s'est fondu dans le décor. Impossible pour les habitués de l'endroit de ne pas le croiser dans son fief de la place Sathonay. Il donnait parfois ses interviews à la sandwicherie qui jouxte la mairie, commandant souvent plus de cafés qu'il ne délivrait de mots. Voir ou avoir vu Slow Joe sur scène, l'avoir écouté sur disque, délivré le feu de rock et de soul qui sommeillait en lui depuis toujours, puis le croiser, petit monsieur tout le monde vivant sa petite vie dans le premier arrondissement, en repensant à ce qu'on avait entendu, avait quelque chose de surnaturel.

Énigme

Où donc pouvait bien se nicher le crooner dans cet homme de plus de 70 ans marchant sur le trottoir ou attablé dans son café préféré ? L'énigme n'est pas anodine. Sa réponse se trouve simplement dans la voix et le rapport à la musique de l'intéressé. Un homme qui chantait depuis l'âge de cinq ans et avait toujours refusé d'en faire son métier (en son temps, il déclina plusieurs propositions), du moins jusqu'à sa rencontre avec Cédric et son groupe.

Un homme qui a toujours fait ce qu'il a voulu et pour qui chanter était vital. Et puisque c'était vital, il chantait, peu importe que ce soit sur une plage de Goa, dans les bars de Bombay, ou sur une scène des Transmusicales... Sur scène ou sur disque il se métamorphosait parce qu'il délivrait la vérité de la musique en lui (tous ces Gene Autry, Elvis, surtout Elvis). Donnant tout, ne faisant jamais semblant, pourquoi aurait-il dû, dès lors, une fois hors de scène, prétendre y être encore ou prétendre être un autre. « La gloire disait-il, c'est davantage de personnes pour vous casser les c... ».

On n'obligeait jamais Joe à faire une chose dont il n'avait pas envie — il nous l'avait confié un jour, et il ne plaisantait pas. On ne l'obligeait surtout pas à annuler un concert en supposant à sa place qu'il serait trop fatigué, car chanter c'était sa vie, sa vraie vie. Mais la vie a ses caprices. Slow Joe & The Ginger Accident devaient jouer le week-end prochain... à Lyon. Joe n'y chantera pas, le cœur qu'il mettait dans sa musique s'est arrêté de battre. Ou plutôt son groupe n'y jouera pas. Car lui, Joseph Manuel Rocha aka Slow Joe, crooner indien devenu chanteur lyonnais, où qu'il se trouve, chantera sûrement. Il a chanté toute sa vie, ce n'est pas pour arrêter maintenant qu'il a toute l'éternité devant lui.

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