Les Muses s'amusent

Théâtre / Treize interprètes sur le plateau, de la musique live, une histoire alambiquée : Les Muses de Camille Germser est un spectacle riche, parfois déroutant mais très enthousiasmant. Renan Benyamina

Camille Germser, metteur en scène de revues théâtrales colorées et excitantes, nous l’avait promis : cette fois, il y aura une histoire et des personnages. Sur scène donc, une troupe qui s’atèle à la création d’une pièce dont personne ne connaît l’auteur. Cette pièce s’intitule Les Muses ; nous découvrirons bientôt qu’elle est l’œuvre de David Bowie. En raconter davantage est périlleux, tant le spectacle repose sur le principe de la mise en abyme. Le théâtre dans le théâtre, la confusion entre décor et réalité, entre acteurs et personnages, c’est un peu le dada de Camille Germser. Les comédiens sont en train de répéter la pièce que nous sommes censés voir. Un décor en fond de scène figure une salle de théâtre vide ; un autre, fictif celui-là, est dressé entre la scène et la vraie sale, représentant une fausse assemblée de spectateurs : nous. Vous suivez ? Le metteur en scène est interprété par Emmanuel Daumas, qui est aussi metteur en scène de la pièce aux côtés de Germser. Pour éclairer ses compagnons sur leurs rôles respectifs, il leur présente une maquette du décor («ah, c’est émouvant le moment de la maquette» s’exclame une comédienne). Là, un lacet tout emmêlé traîne, insignifiant, jusqu’à ce que Daumas explique : «c’est le fil rouge du spectacle». Ce fil rouge sans début ni fin est parsemé de nœuds qui s’avèrent les lieux des plus grandes réussites du spectacle mais aussi de ses limites.Caprice
Le spectateur oscille constamment entre ivresse heureuse et perplexité face à ce déferlement absurde de petites histoires, de grands récits mythologiques, de trouvailles scéniques kitsch et de réflexions plus ambitieuses sur l’art de la représentation. Le trouble est assumé, les personnages s’indignent eux-mêmes de la confusion qui règne entre le théâtre et la vie. Au milieu de ce chaos théâtral d’où surgissent autant de moments de grâce que de situations déroutantes, il y a la musique. Car régulièrement, les sept comédiennes fétiches de Germser entonnent des chansons assorties de petites chorégraphies ; on ne peut alors s’empêcher de penser au François Ozon de Huit femmes. L’esthétique générale du spectacle est une vraie réussite, mélange de théâtre de plateau et de comédie musicale glamrock. Des robes à paillette, des boas, de la fumée et des montagnes en carton-pâte ; ça brille, c’est ridicule, c’est beau. Il y a quelque chose d’un caprice d’enfant dans le travail de Camille Germser, qui touche juste autant qu’il peut agacer. Le caprice d’un enfant qui refuse d’arrêter de jouer, que l’idée de la mort révolte mais qui trouve là son inspiration. Pour notre plus grande satisfaction.

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