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Quand Xavier Veilhan mêle dessins et patins

Compulsory Figures

Les Subs

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Article publi-rédactionnel / C’est sur une patinoire, sous la verrière des Subsistances que l’artiste Xavier Veilhan va créer "Compulsory figures", du 5 au 8 décembre, avec son acolyte canadien Stephen Thompson. Entre art graphique et ré-émergence d’une pratique de patinage sur glace disparue, celle des figures imposées, le Français invente un spectacle hybride dont il nous détaille la conception.

Vous avez beaucoup travaillé sur le mouvement jusque là, vos sculptures monumentales de personnages (Les Habitants installés à la Cité Internationale de Lyon par exemple) sont souvent en train de marcher. Est-ce Compulsory figures est une nouvelle étape de cette recherche ?

Xavier Veilhan : Oui on peut dire cela. C'est un leitmotiv de mon travail qui vient aussi du fait que, d'une manière générale, on a une perception dynamique de la réalité par rapport à ce qu'il y avait, par exemple, dans l'Antiquité où la réalité résidait dans ce qui était immobile et immuable.

Ce projet atypique se passe sur glace, dans une patinoire de 13 mètres sur 13. Le mouvement peut y être limpide et rapide. Est-ce cet aspect qui vous a fait choisir cette surface particulière ?

Avec la glisse, il y a quelque chose de l'ordre d'un domaine parallèle, comme la chute dans le vide ou l'apesanteur, une « apesanteur horizontale », comme j’aime à dire pour le projet de Compulsory figures. Tout le monde peut éprouver que, sur la glace, on peut déplacer un poids beaucoup plus facilement qu'autrement. Cela ouvre un champ des possibles différents. C'est comme une enclave dans la réalité. Cela n’a rien de surnaturel mais relève plutôt du merveilleux. Quand on voit quelqu'un se déplacer sur la glace, il a un champ des possibles plus grand.

Cependant, ce qu'on va voir sur la glace n'est pas ce que proposent les compétitions internationales de patinage artistique actuelles. Il s'agit ici de « figures imposées » qui ont été retirées de ces compétitions en 1990. Ce ne sont pas des gestes amples mais, au contraire, un travail très pointilleux et technique mené avec Stephen Thompson...

Le projet vient de la rencontre avec Stephen dont j'ignorais le passé de patineur car il est plutôt présent dans la danse contemporaine. Ce qui m'a intéressé est cette histoire de la disparition d'une catégorie aux Jeux Olympiques qui était comme une branche morte dans l'évolution de ce sport car elle n'était pas assez spectaculaire et donc pas assez adapté à sa reprise par des différents médias, principalement la télévision. Comment le spectacle élimine une catégorie sportive ?

Bien sûr il y a des sujets plus importants dans le monde mais je trouvais qu'il y avait quelque chose d'assez beau dans cette manière dont les gens répétaient inlassablement une pratique liée au dessin. Cela me touche aussi car c'est lié à quelque chose d'assez primitif du dessin, à la gravure, à la trace.

Allez-vous chercher à dessiner précisément les choses, à composer des tracés géométriques très nets ou allez-vous faire en sorte que le spectateur puisse y projeter ce qu'il veut ?

Cette géométrie et rigueur de départ vont s'ouvrir sur quelque d'assez fantaisiste, presque absurde. Mon propos n'est pas du tout de reproduire des dessins mais d'utiliser cela comme un prétexte de départ pour un spectacle dans lequel il n'y a pas vraiment de narration mais une succession de scènes qui questionnent le spectaculaire, la performance physique...

Ces figures imposées ont été éliminées des compétitions car elles n'étaient pas assez spectaculaires. Allez-vous chercher à les spectaculariser ?

On est dans une configuration où le spectacle apparaît de manière beaucoup plus intime car ce sont de toutes petites jauges avec trois gradins. Nous sommes en tri-frontal, près de ce qui se passe sur la glace et la patinoire est beaucoup plus petite que celles des compétitions. Il y a une proximité avec le public. Il y aura des gestes classiques du patinage, comme les spinns (tourner sur soi-même) qui sont assez spectaculaires. Toutefois l’idée n'est pas du tout d'aller vers la performance. Stephen est un très bon patineur mais il a 40 ans, il revient au patin, il apporte plutôt son expérience de danseur et on est dans une patinoire dont le champ des possibles est limité par la taille. Ce qu'on perd en vélocité, on le gagne en proximité.

Par ailleurs, il y a aussi toute une part du spectacle liée à la musique, à l'utilisation de la vidéo et à la participation du public et moi je serai sur scène en train de dessiner le tracé fait par le patineur avec ses patins. Les Compulsory figures sont un prétexte pour déployer un univers de l'ordre de la dimension poétique et lyrique. Ces mouvements et ce dispositif scénique ne sont pas habituels dans les arts, ils sont plutôt empruntées à l'univers du sport. Et la création lumière va autant être empruntée au monde du sport qu'à celui du spectacle. Il y a, par exemple, une sorte d'écran qui permet au spectateur de bien voir ce qui se passe au sol. C'est un peu comme dans les stades avec les écrans qui reproduisent les actions, font des retours en arrières. J’introduis aussi, dans ce dispositif, des extraits de films de Buster Keaton… car je me nourris de beaucoup de choses différentes. Je regarde autant le kabuki que le théâtre de rue, le mini-golf que les jumpings de chevaux... Au cinéma, je suis intéressé plus par les tutorials que par les films eux-mêmes, c’est-à-dire par la manière dont les gens prennent possession de l'outil cinématographique pour faire passer des idées très simples ou des choses comiques, etc. J'investis le spectacle vivant avec cette approche-là, en empruntant des formes de spectacles qui peuvent être un peu triviales comme les pom-pom girls ou des majorettes même si c'est un peu dépassé. Les spectacles de rue sont comme une intrusion poétique à l'intérieur d'un univers quotidien.


Avez-vous une envie d'approcher un nouveau public peu habitué au spectacle vivant en faisant cette démarche sur glace ?

Oui quand on m'en donne la possibilité mais ce n'est pas une recherche prioritaire. C'est un peu comme avec les sculptures dans l'espace public : ce qui me plait est qu’on est au même niveau tout à coup qu'un bus qui passe, un arbre, un bâtiment, une personne. Ce spectacle est un peu une extension du champ dans lequel je m'exprime, celui des arts visuels en général, de la sculpture ou de l'installation. Pour moi, Compulsory figures est comme une sorte d'atelier dans lequel on convierait des gens à participer visuellement à l'expérience. Mais je ne sais pas quelle va être la réaction du public. Je n'y réfléchis pas beaucoup. Je cherche surtout à créer et la meilleure manière de faire quelque chose qui touche ce public est de ne pas être à la recherche du spectaculaire mais attentif à la création d'une ambiance, d'un état.

Vous avez évoqué l'intervention des spectateurs. Elle sera concrète ?

Je ne demande pas aux spectateurs de participer au spectacle mais ils sont en vis-à-vis donc ils se voient. C'est un peu une situation de stade où il y a beaucoup de lumière sur les joueurs cela permet quand même de voir son voisin. Ce n'est pas comme au théâtre ou à l'opéra. La participation ne signifie pas se lever et se mettre à danser mais je sollicite cette participation même par un coup d'œil en passant et par l'activation d'une mémoire ou d'une expérience personnelle vis-à-vis d'une image ou d'une sculpture. Ce qui compte n’est pas tant les sculptures et les objets d'art ou l'exposition que ce que les gens en retirent.

J’aime faire des choses très populaires comme lorsque quand je fais une exposition à Versailles ou que mes installations dans l'espace public deviennent des lieux de rendez-vous... Avec Compulsory figures, je m’approche de cette idée-là et j’essaye d'introduire une forme d'audace ou de radicalité et d'emmener les gens dans mon univers tout en n'étant jamais condescendant. Être toujours de plain-pied.

& aussi :

- Workshop sur glace avec Stephen Thompson suivi d’un brunch maison
Samedi 7 décembre de 10h30 à 12h / 18 € par participant, sur réservation
Tous niveaux - à partir de 15 ans
Possibilité d’apporter ses propres patins ou d’en louer sur place

- Une soirée ciné-clubbing avec Maud Geffray (live + projections / Dj-set)
Samedi 7 décembre à 21h
10 € / gratuit pour les détenteurs d’un billet pour Compulsory Figures

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