De Vincent Garenq (Fr, 1h46) avec Gilles Lellouche, Charles Berling, Laurent Capelluto...
C'était un défi : raconter le calvaire de Denis Robert, aux prises avec l'affaire Clearstream pendant près de dix ans en une fiction (très) documentée de 106 minutes. D'autant plus que L'Enquête vient après une série de films français tirés de faits réels tous plus inopérants les uns que les autres, incapables de transcender leur matériau de départ ou de contourner les clichés du genre. Vincent Garenq, peut-être parce qu'il avait déjà essuyé les plâtres avec le pas terrible Présumé coupable d'après l'affaire d'Outreau, s'en sort avec les honneurs : son film est prenant, rapide, habilement construit et cherche en permanence à donner de l'ampleur cinématographique à son sujet.
Il n'y parvient pas toujours, les scories du polar hexagonal sont bien là — les flics sont raides comme des flics, les avocats parlent comme des avocats — et on reste loin d'un Sidney Lumet. Mais L'Enquête a pour lui son désir de ne rien cacher, ni les noms des protagonistes, ni leurs renoncements, ni leurs énigmes. De Libération à De Villepin en passant par le boss d'Elf, le film ne fait pas de prisonniers et fonce à la même allure que son héros — incarné par un Gilles Lellouche plutôt pas mal ; tout arrive ! Sa quête de vérité, obsessionnelle et aveuglante, est mise en parallèle avec le travail patient du juge Van Ruymbeke — excellent Charles Berling — et l'intrusion inexpliquée du mythomane Imad Lahoud.
Ces trois lignes de récit convergent lentement vers une issue incertaine, ce qui crée un réel suspens à l'écran. L'Enquête a pour lui sa double honnêteté : un sujet qu'il est bon de remettre sur le tapis et un travail d'artisan sérieux et modeste derrière la caméra.
Christophe Chabert