De Nina et Denis Robert (Fr, 1h30) documentaire
Ce film sur (François) Cavanna commence par la toute fin : les funérailles de l'écrivain, début février 2014, où des lecteurs anonymes et des camarades célèbres viennent lui rendre hommage. Drôle de sensation pour le spectateur : celui d'assister à une répétition générale de ce qui se produira onze mois plus tard avec l'enterrement des dessinateurs de Charlie Hebdo. Cavanna en fut le fondateur avec le Professeur Choron, en prolongement de l'aventure Hara Kiri qui défia les bonnes mœurs et la censure dans les années 60 et 70.
Si ce documentaire à deux têtes (le journaliste Denis Robert et sa fille Nina), il a aussi deux faces : d'un côté, un hommage au Cavanna écrivain insatiable, auteur de 50 romans dont quelques best-sellers (Les Ritals, Les Ruskoffs, Bête et méchant) ; de l'autre, l'évocation de cet âge d'or où tout semblait permis car rien n'était autorisé. Denis Robert va à la rencontre d'un Cavanna affaibli et fatigué, tandis que Nina tisse un montage où se télescopent archives, citations et témoignages (Willem, Delfeil de Ton, Siné...) souvent passionnants qui convergent vers un même sentiment de crépuscule.
Ce que la dernière demi-heure finit par souligner maladroitement, revenant une énième fois sur la trahison de Philippe Val et ajoutant un épilogue édifiant et malvenu sur la tuerie du 7 janvier, ce qui est pour le moins contradictoire tant le film semble sous-entendre que ce Charlie-là n'avait plus grand chose à voir avec l'esprit des débuts.
Christophe Chabert