Godot serait-il un passeur ?

En attendant Godot

La Comédie de Saint-Etienne

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Dans la mise en scène tricéphale d’"En attendant Godot", les deux rôles principaux confiés à des acteurs africains confèrent au texte une résonance particulière puisant ses racines dans l’actualité. Florence Barnola

Les saisons culturelles offrent cette année une lecture polyphonique d’un des textes les plus connus et les plus joués de Beckett. Trois Godot à voir dans la région en l’espace de quelques mois : Jean-Pierre Vincent, Laurent Fréchuret, et nos trois metteurs en scène qui nous préoccupent ici, se sont intéressés à la pièce de Samuel Beckett. Il pourrait y avoir encore vingt autres créations et nous découvririons à chaque fois des sens cachés dans ce texte énigmatique. On reconnaît les grandes pièces à leur universalité, elles sont comme un passepartout qui ouvre n’importe quelle serrure. La mise en scène tricéphale du texte de Beckett est intéressante à bien des égards. D’abord ce sont trois regards croisés bien distincts sur l’oeuvre du dramaturge irlandais. Jean Lambert-Wild (qui a fait ses armes plusieurs années auprès de Matthias Langhoff), Marcel Bozonnet (longtemps sociétaire de la Comédie Française) et Lorenzo Malaguerra (qui signe là sa deuxième co-mise-en-scène avec Lambert-Wild) ne sont pas des nouveaux venus, ils ont de belles (et différentes) expériences à leur actif et donc des choses à dire.

La Croatie, la Grèce ou Calais ?

Le trio donne une lecture intelligente et sensible du texte de Beckett en confiant les personnages de Vladimir et Estragon à des acteurs ivoiriens. En attendant Godot entre alors en résonnance avec l’actualité. Le texte de Beckett prend une dimension inconnue jusqu’alors. Les vagabonds deviennent sous nos yeux deux migrants perdus dans un no man’s land qui pourrait se situer à Calais, en Turquie, en Grèce, en Croatie... On peut aisément imaginer Godot, attendu comme le Messie, dans le rôle d’un passeur. « Pour nous Africains, En attendant Godot est cet avenir-là » confie Fargass Assandé (Vladimir), « quand on sacrifie notre vie pour passer en Europe. Le Godot vu de notre côté est cette croyance à Dieu, cette espérance à ce demain que l’on ne connaît pas. J’ai l’impression que Beckett est d’aujourd’hui et qu’il a écrit caché, quelque part dans une ville africaine. » Ironie du sort, lors de la création du spectacle en 2014, l’un des comédiens, Michel Bohiri (Estragon), a lui-même connu des difficultés pour venir répéter en France, ayant du mal à obtenir un visa. FB

En attendant Godot, mis en scène par Marcel Bozonnet, Jean Lambert-Wild, Lorenzo Malaguerra, à la Comédie de Saint-Etienne du 17 au 19 novembre à 20h

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